Sa mère Margaret avait travaillé comme ouvreuse de cinéma. Sa première femme, Angela Barnett, était une actrice américaine. Aujourd’hui, son fils Duncan Jones a repris le flambeau en devenant réalisateur. Du début jusqu’à la fin de sa vie, David Bowie a été très proche de l’univers cinématographique.
Tout commence deux ans avant son succès planétaire Space Oddity. En 1967, il rencontre le directeur d’une compagnie de théâtre qui lui enseigne le mime et travaille avec lui sur l’expression corporelle. En parallèle de sa carrière de chanteur, David Bowie commence alors à jouer de petits rôles au théâtre et dans des films.
Un extraterrestre venu sur terre
Son premier grand rôle ? Un extraterrestre venu sur terre. Sa mission dans L’Homme qui venait d’ailleurs, réalisé en 1977 par Nick Roeg : sauver sa planète menacée de mort. Deux ans plus tard, Bowie se retrouve dans le rôle d’un officier prussien à côté de Marlene Dietrich dans C’est mon gigolo. Son talent d’acteur est même reconnu sur les planches de Broadway. Au début des années 1980, le chanteur y réussit un véritable tour de force en excellant dans le rôle principal de The Elephant Man pendant 157 représentations.
En 1983, Bowie caracole en tête des charts avec Let’s dance. Mais au cinéma, il interprète dans Les prédateurs un mari devenu immortel grâce à une belle femme-vampire, incarnée par Catherine Deneuve. Le réalisateur japonais Nagisa Oshima a, lui aussi, fait appel au génie de David Bowie pour incarner dans Furyo un homme dans un camp de prisonniers japonais durant la Seconde Guerre mondiale. Ensuite, il a aussi bien interprété un agent du FBI dans Twin Peaks de David Lynch que Ponce Pilate dans La Dernière Tentation du Christ, réalisé par Martin Scorsese ou Andy Warhol dans un film biographique sur le peintre Jean-Michel Basquiat.
« Where are we now ? »
Au-delà du cinéma, il a puisé son inspiration dans les arts plastiques. Where are we now ? demandait David Bowie à la sortie de son album en 2013 qui faisait résonner son époque berlinoise. Dans les années 1970, étant lui-même déjà l’incarnation d’une certaine décadence des mœurs avec son ambiguïté sexuelle et son excentricité vestimentaire revendiquée, il avait atterri à Berlin-Ouest, une ville emmurée, réputée être aussi décadente que créative.
Car l’expressionnisme allemand était l’une des raisons pour lesquelles Bowie s’était installé dans cette ville. De 1976 à 1978, l'artiste, adepte du chef d’œuvre Metropolis de Fritz Lang, avait vécu dans le quartier Schöneberg, pratiquement sans un sous en poche, mais avec la volonté de se débarrasser de son addiction à la cocaïne et de découvrir les expressionnistes allemands dans les musées berlinois. Et c’est à Berlin qu’il avait réalisé trois de ses albums les plus intéressants : Low, Heroes et Lodger.
David Bowie et l'expressionnisme allemand
Ses métamorphoses sur scène, Bowie les devait aussi à l’esthétique du cabaret allemand de l’entre-deux-guerres et à la technique de la distanciation au théâtre épique de Bert Brecht avec la création de l’étonnement et de la curiosité. Sans oublier le recours à l’esthétique dépouillée de l’expressionnisme allemand.
A Berlin, au Brücke-Museum, l’artiste admirait les peintures d'Erich Heckel, cofondateur du mouvement Die Brücke en 1905. Notamment le tableau Roquairol (1917) avait influencé l’album Heroes, sorti en 1977. En regardant l’Homme en marron de l’expressionniste allemand, avec son visage carré et androgyne, on peut apercevoir les traces laissées dans l’imagination et l’œuvre de David Bowie. A l’origine graveur sur bois, Heckel avait exécuté sur ses toiles des traits d’une grande rigueur et créé des visages émaciés. Dans l’exposition David Bowie, montée à Londres avant sa tournée à Berlin, deux œuvres d’Erich Heckel étaient accrochées à côté de dessins et de peintures réalisés par David Bowie à Berlin. C’est ici qu’il avait affirmé « We can be heroes just for one day ». Aujourd’hui, le héros a quitté la scène, pour toujours.
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