Le mois de décembre est le plus important pour les fleuristes, les jardineries spécialisées et la grande distribution, grâce aux fêtes de fin d’année. Et les sapins ne sont pas en reste dans ce bénéfice commercial. Quelque 6,7 millions de sapins (en grande majorité, des sapins naturels) ont été achetés l’an dernier, selon une étude consommateurs de TNS Sofres, réalisée début 2015 sur 4 748 ménages français. Cela représente près d’un quart des foyers qui ont acheté un sapin pour décorer leur domicile.
Le chiffre d’affaires total de ce marché est estimé à 174,1 millions d’euros. Un montant qui peut attirer les convoitises. Car, tous les ans, des vols de sapins sont rapportés par la presse régionale. Uniquement cette année, par exemple, Corse-Matin informe que plus d’une dizaine de sapins décorés par la fédération des commerçants ont été dérobés à Corte (Haute-Corse). À Tours, quatre sapins installés carrefour de Verdun ont été volés, ce qui a suscité l’incompréhension d’un riverain : « Qui peut bien voler ces sapins la nuit ? », rapporte La Nouvelle République.
Une « guerre des sapins » qui vaut une suspension
En 2011, la presse nationale (Libération, Le Monde, etc.) se faisait même l’écho d’une véritable « guerre des sapins » que se livraient les internes des trois lycées de la montagne Sainte-Geneviève à Paris, Henri-IV, Louis-le-Grand et Saint-Louis. La tradition consiste à voler plus de sapins que l’autre lycée pour gagner. Les sapins sont rendus un jour après.
Mais, cette année-là, une dizaine d’élèves du lycée Henri-IV écopent d’une exclusion temporaire pour avoir dérobé quatre sapins de la Ville, installés devant le Panthéon. Les auteurs du larcin ont été identifiés car la mairie, exaspérée que des sapins d’une valeur de 100 euros ne soient pas rendus en bon état, a fait enduire les troncs des arbres de goudron frais pour retrouver leur trace.
Pour éviter une telle déconvenue, à Montpellier, un commerçant a même installé un anti-vol sur son sapin. Le tronc de l’arbre est relié, par une chaîne et un cadenas, à un panneau de signalisation.
En Irlande, 100 000 euros de pertes à cause des vols de sapins
Mais les vols de sapins ne sont pas toujours des affaires relativement bénignes. En Irlande, dans le comté de Wicklow, au sud de Dublin, ce sont de véritables gangs qui ont sévi pour dérober les sapins de Noël. L’affaire a été prise au sérieux par la police lorsqu’un fermier a été « ligoté et dépouillé sous la menace d’une arme à feu », selon un planteur de sapins du coin. Il y a quatre ans, le rythme des vols avait atteint 2 000 arbres par an, ce qui représente 100 000 euros de pertes de revenus.
Cette année, la Garda, la police nationale irlandaise, a donc lancé une campagne contre les voleurs, « Obstacles ». Les fermiers sont encouragés à renforcer la sécurité autour de leurs exploitations, notamment par des patrouilles et des barrages. Un fermier a même installé des caméras de sécurité couplées à des détecteurs de mouvements pour le prévenir au moindre frémissement de ses sapins. La police, de son côté, a mené des patrouilles en hélicoptères pour repérer les voleurs.
La Garda s’est félicitée de cette opération de sécurité : le nombre d’arbres volés s’est effondré et seulement des « incidents mineurs » ont été enregistrés, selon le commissaire de police Paul Hogan.
« Peut-être 15-20 vols sur une production de plusieurs centaines de milliers de sapins »
En France, la situation des producteurs est loin d’être aussi dramatique qu’en Irlande. Et au sujet des larcins sur les marchés de Noël, ils restent aussi marginaux, bien qu’en apparence, les vols soient très répandus, sûrement à cause de leur médiatisation.
La Direction générale de la police nationale explique : « Il est impossible d’avoir des chiffres précis sur le nombre de vols de sapins, car c’est un phénomène qui reste très à la marge. Il n’y a pas non plus, a priori, de mesures spécifiques qui sont prises contre le vol de sapins. Les vols ne sont pas recensés selon le type d’objets volés, mais selon le modus operandi, c’est-à-dire le mode opératoire du vol (sauf pour les objets qui pourraient être utilisés pour des délits, comme des vols de véhicules). »
Frédéric Naudet, président de l’association française du sapin de Noël naturel, ajoute : « Sur le nombre de sapins volés, ce n’est pas un chiffre que l’on réclame à nos adhérents et on n’a aucune remontée à ce sujet. On a eu des cas, il y a peut-être une dizaine d’années, mais tout cela reste très ponctuel. »
Alors qu’il est co-directeur des pépinières Naudet, il reconnaît qu’il y a sûrement des vols dans ses champs : « Oui, en tant que producteur, on s’en fait voler quelques-uns. Je ne peux même pas vous dire combien parce qu’on ne les compte pas. Peut-être 15-20 sapins par an. Mais, sur une production de plusieurs centaines de milliers de sapins, c’est tout à fait marginal. »
D’éventuelles mesures contre le vol de sapins seraient d’ailleurs trop difficiles à prendre, selon Frédéric Naudet : « Les parcelles de sapins sont plutôt disséminées, donc c’est impossible de tout surveiller. Il faudrait payer des vigiles pour surveiller ces parcelles pendant la nuit, car c’est souvent pendant cette période qu’ont lieu les larcins. Mais de toute façon, le marché du sapin est un milieu assez fermé. Pour en voler, il faudrait avoir un écoulement possible, or les contrôles sont plutôt stricts. »