Pour restituer le contexte, il faut savoir que les cinq membres du comité Nobel sont élus par le Parlement norvégien, comme Alfred Nobel l’a voulu dans son testament, c’est lui qui a offert ce prix à la Norvège, les autres prix Nobel étant décernés en Suède.
Les nominations viennent du monde entier. Elles restent secrètes et sont closes dès le 1er février. Les cinq membres se réunissent ensuite environ une fois par mois, c’est un processus lent et collectif qui permet de dégager un consensus autour d’un lauréat.
Cette année le comité a été secoué par un changement inattendu de président lors de sa première réunion début mars, qui a alimenté les interrogations sur sa réelle indépendance vis-à-vis du pouvoir politique norvégien. Puis Geir Lundestad, l’ancien secrétaire du comité en place ces 25 dernières années, a récemment publié un livre dans lequel il outrepasse son devoir de réserve, ce qui n’a pas du tout plu au comité.
Des controverses révélatrices sur le comité Nobel norvégien
Geir Lundestad n’a pas hésité à donner sa vision des membres du comité qu’il a côtoyés, dont les deux plus éminents du comité actuel, le président déchu Thorbjørn Jagland et la nouvelle présidente Kaci Kullmann Five, qu’il décrit comme très sérieuse et rigoureuse mais assez faible. Lundestad a surtout révélé qu’en 2010 le ministre des Affaires étrangères norvégien avait prévenu à deux reprises le président du comité des retombées très négatives qu’un prix décerné au dissident chinois Liu Xiaobo pourrait engendrer pour la Norvège. Ce que l’ancien secrétaire qualifie de véritable tentative de pression du pouvoir politique norvégien sur le comité Nobel.
Le changement de président en début d’année révèle lui des dissensions internes entre les membres du comité. Geir Lundestad a d’ailleurs confirmé dans son livre que l’ancien président était de plus en plus discuté.
Des conséquences pour le prix à cours et long terme
Alors, le comité Nobel va se replier sur lui-même. Il n’y a aucune fuite à espérer cette année sur le nom du lauréat qui sera annoncé ce vendredi. Mais, cela n’aura sans doute pas d’influence sur le choix du lauréat. On pourrait penser que le comité va vouloir jouer l’apaisement avec un prix qui ferait l’unanimité, par exemple le Haut Commissariat pour les Réfugiés en cette période où l’on parle beaucoup des réfugiés. Mais, le prix Nobel de la paix reste un prix politique. Le comité Nobel n’a jamais eu peur de soulever le débat avec sa récompense.
La composition de ce comité risque par contre d’être discutée encore dans les années qui viennent. On peut s’attendre à ce que des anciens Premiers ministres ou ministres des Affaires Etrangères de la Norvège ne soient plus élus dans cette institution, afin de renforcer son indépendance.
Mais, il est peu probable que des personnalités étrangères y soient prochainement élues, car malgré les controverses les Norvégiens restent très attachés au cadeau que leur a fait Alfred Nobel dans son testament.