Réfugiés: l’Allemagne qui hésite, l’Allemagne qui tranche

Les ministres européens de l’Intérieur vont se réunir le mardi 22 septembre prochain à Bruxelles pour une nouvelle réunion extraordinaire sur la question de la crise des réfugiés. L’Allemagne, qui appelle avec l’Autriche à l’organisation d’un sommet extraordinaire de l’Union européenne sur cette question, a été accusée de mener une politique « incohérente », en suspendant les règles de Shengen. Angela Merkel s’en défend et réclame plus d'harmonisation européenne.

L’Allemagne s’attend désormais à recevoir entre 800 000 et un million de demandeurs d’asile. Dès le début de la crise, Berlin a fustigé la Macédoine et la Hongrie pour leurs tentatives de bloquer l’afflux des réfugiés, en expliquant qu’il faut les recevoir pratiquement tous, et que l’Allemagne va en recevoir des centaines de milliers.

Dernièrement, l’Allemagne semblait avoir faire un pas en arrière, en rétablissant partiellement les contrôles aux frontières. Ce qui lui a valu, mardi, une sévère critique du ministre tchèque de l’Intérieur, qualifiant la politique allemande d’« incohérente ». La chancelière Angela Merkel explique que la suspension de l’accord de Schengen doit simplement faciliter l’enregistrement des réfugiés, mais la perception de cette décision de l’extérieur est parfois différente.

Berlin plaide pour plus de solidarité européenne

Vue de Berlin, la politique allemande est pourtant claire et logique : comme l’a souligné la chancelière elle-même, il s’agit de « revenir à l’esprit européen », d’aboutir à une juste répartition des réfugiés parmi les pays membres de l’Union, tout en bien organisant et contrôlant le flux migratoire.

Or, c’est précisément la répartition des réfugiés qui pose problème au sein de l’Union européenne. Plusieurs pays d’Europe centrale s’opposent farouchement au projet de la Commission européenne, qui prévoit l’introduction de quotas obligatoires des réfugiés pour chaque pays membre. Ce refus a agacé le ministre allemand de l’Intérieur au point de suggérer une réduction des fonds structurels versés aux pays qui rejettent l’idée de quotas.

Convaincre les autres Etats membres

Toutefois, il a été rapidement démenti par Angela Merkel, qui a dit ne pas vouloir résoudre le problème en utilisant la menace. La Commission européenne a également réagi rapidement aux propos du ministre allemand, en déclarant qu’elle n’était « pas pour la punition », mais « pour l’encouragement ».

Sans doute pour clarifier la situation parmi les membres de l’Union européenne, l’Allemagne a appelé, avec l’Autriche, son voisin également aux prises avec la vague incessante des arrivées des réfugiés, à la convocation, la semaine prochaine, d’un sommet extraordinaire des Vingt-Huit.

Lors de cette réunion, l’Allemagne veut convaincre tous les autres pays d’adopter sa position par rapport aux réfugiés. A savoir, qu’ils ne constituent pas seulement un difficile problème à résoudre, mais qu’à moyen et long terme ils sont une richesse, dont l’Europe aura peut-être vraiment besoin. L’Allemagne connaît en effet des problèmes démographiques et elle manque de cadres dans certains secteurs.

Les réfugiés, « un investissement »

Parmi les réfugiés, et les Syriens en particulier, il y a beaucoup de personnes bien éduquées et parlant parfois plusieurs langues. Des voix se lèvent parmi les économistes allemands et du côté du patronat pour dire qu’il faut traiter l’accueil de réfugiés comme « un investissement ». Le gouvernement ne peut pas rester sourd aux conseils de ce genre.

Bien évidemment, il doit également prendre en compte l’opinion publique, mais celle-ci reste jusqu’à maintenant largement favorable à l’accueil des réfugiés. Il y a, en Allemagne, un véritable mouvement de solidarité avec ceux-ci. Ce qui n’est pas le cas des pays d’Europe centrale qui s’opposent à l’introduction de quotas obligatoires.
Comme souvent, la situation économique et politique intérieure détermine en grande partie la politique en général, aussi bien en Allemagne qu’ailleurs.

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