Comment les Grecs appréhendent les propositions faites par Athènes

Après l’annonce des nouvelles propositions d'Athènes (hausse des taxes sur le transport maritime, suppression des avantages fiscaux pour certaines îles, hausse de la TVA pour la restauration), c'est-à-dire l'essentiel des mesures rejetées lors du référendum, la rue grecque, elle n’a pas tardé à réagir.

Avec notre envoyé spécial à Athènes,  Romain Lemaresquier

Les propositions de réformes envoyées par Athènes ne vont certainement pas faciliter la vie des Grecs. Il s'agit tout simplement de mesures d'austérité qui vont toucher toute la société. L'augmentation de la TVA pour la restauration va par exemple étrangler un peu plus un secteur déjà mal en point selon Apostolos, propriétaire d'un café à côté de la place Syntagma, dans le centre d'Athènes.

« Si on prend en considération le fait que dans beaucoup de pays de l'Union européenne, au sud, mais surtout au nord et également en Turquie, qui est un pays très compétitif dans le secteur du tourisme, la TVA est à 13% voire parfois à moins de 10%, ici en l'augmentant à 23% on met un terme à la compétitivité de nos cafés et restaurants. On ne pourra pas répercuter sur notre clientèle cette augmentation et par conséquent ce taux est une catastrophe », explique-t-il.

Public versus privé

Alexander Lamnidis pousse un cri d’alarme. Selon le directeur de la confédération grecque de tourisme (secteur clé de l'économie grecque), les réservations de dernières minutes ont chuté de 30% depuis début juin. Pour lui, les propositions faites par le gouvernement à l'euro zone sont nécessaires, bien qu'elles risquent d'handicaper la compétitivité de la Grèce face aux autres pays du sud de l'Europe : « Les mesures prises sont dures et nous aimerions avoir une TVA sur l'hôtellerie et la restauration qui soit compétitive avec celle du reste de l'Europe du sud. De toute évidence, un taux de 13% sur l'hôtellerie et de 23% sur la restauration est vraiment très élevé. Ce que nous voulons, c'est être compétitif. Nous sommes contents que le gouvernement grec se rapproche d'un accord, nous en souhaitons un. »

Des voix s'élèvent pour dénoncer l'absence de mesure sur un secteur qui est toujours protégé par l'Etat en Grèce, la fonction publique. C'est en tout cas l'opinion de Michalis Moussou, directeur général d'une des plus grosses agences immobilières de Grèce : « Avec les mesures annoncées, on ne touche pas au secteur public et encore une fois le secteur privé est appelé à prendre tout sur son dos. C’est une vieille tradition grecque qui dure depuis 1974. Le premier chantier auquel devrait s’attaquer quiconque, c'est à un secteur public monstrueux qui offre une armée d’environ 1,7 million d’électeurs, une armée qui vote tout le temps. Le secteur privé est considéré comme un secteur qui n’a rien à voir avec l’économie du pays, comme un secteur qui ne s’intéresse qu’à sa propre caste. Mais dans tous les pays, même dans les pays qui étaient socialistes, c’est toujours le secteur public qui était la locomotive de l’économie. »

Soulagement

Certains professionnels envisagent des baisses de salaires, d’autres attendent de voir comment vont réagir les consommateurs. Il y en a même qui pensent se recycler dans un autre domaine. Concernant les retraités, la baisse des pensions sera difficilement supportable, mais cela était déjà le cas avec les mesures d’austérité prises par les gouvernements précédents.

Mais pour beaucoup de ceux qui ont voté non aux mesures d'austérité proposées par les créanciers de la Grèce lors du référendum de dimanche dernier, même si les propositions d'Athènes sont du même acabit, il s'agit d'une solution acceptable comme l'explique Marta, une future retraitée : « Je crois que le non n'était pas pour une sortie de l'Europe. C'était plutôt pour que les mesures soient moins dures, plus souples et plus correctes. »

La société grecque respire depuis jeudi soir et l’annonce de l’envoi d’un paquet de réformes par le gouvernement d’Alexis Tsipras à ses créanciers. A Athènes, beaucoup de gens commençaient à douter de la sincérité du Premier ministre et de son parti Syriza. Alors même si ces mesures vont amener les Grecs à se serrer encore davantage la ceinture, le simple fait de rester dans la zone euro et dans l’Union européenne représente en quelque sorte une victoire. Que l’on ait voté oui ou non lors du référendum dimanche dernier, tout le monde s’accorde à dire que la priorité était d’éviter une sortie de l’euro zone.

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