Avec notre correspondant au Vatican, Olivier Bonnel
Signe de l’importance de ce texte, il a été présenté dans la salle du Synode du Vatican, et non dans la salle de presse, beaucoup plus petite. L’introduction a été faite par le cardinal Turkson, président du Conseil pontifical « Justice et Paix », qui en a écrit la première mouture.
Le cardinal a rappelé que l’encyclique tirait son nom du Cantique des créatures de Saint-François d’Assise. « Quel type de monde désirons-nous transmettre à ceux qui viendrons après nous ? », s’interroge le pape. Une question qui invite à réfléchir aux valeurs sur lesquelles se base la vie sociale.
« Maison commune »
Laudato si' est un texte très dense, qui s’articule en six chapitres (accéder au texte complet sur le site du Vatican). Il commence par un tour d’horizon étayé par la science, qui dresse un constat alarmant sur l’état de « notre maison commune », comme l'écrit François.
Mutations climatiques, problèmes d’accès à l’eau, perte de la biodiversité ; le pape évoque une dette écologique du Nord envers le Sud, et relie cela au récit biblique de la Création, où la relation avec Dieu, avec le prochain et avec la Terre a été rompue.
« Ecologie intégrale »
Point névralgique de l’encyclique, le chapitre 3 revient sur la racine humaine de la crise écologique : le pape s’interroge sur les avancées technologiques, parfois sources de progrès, mais aussi porteuses de limites. En dérive ainsi une logique du « jetable » dénoncée avec force par le souverain pontife.
Derrière le constat, le pape invite à développer ce qu’il appelle une « écologie intégrale », une idée centrale de cette encyclique, celle que tout est lié. « Il n'y a pas deux crises séparées, souligne le pape, l'une environnementale et l’autre sociale ».
« Autre style de vie »
Laudato si' plaide pour cette écologie inclusive, faite de justice sociale. Un nouveau système où sont interrogés nos modes de consommation : « L’environnement fait partie de ces biens que les mécanismes du marché ne sont pas en mesure de défendre ou de promouvoir de façon adéquate », écrit François d’un ton sévère.
Le pape plaide aussi pour un dialogue à l’échelle locale comme internationale. Il égratigne au passage les nombreux sommets sur le climat jusqu’ici inefficaces. Au final, Laudato si' propose de « miser sur autre style de vie » où chacun trouve sa place, à commencer par ceux qui sont les plus faibles.
→ À relire : Laudato si', l’encyclique écolo révolutionnaire du pape François
ANALYSE : La révolution verte du pape François
C’est à une véritable révolution qu’appelle le pape François dans ce document de près de 200 pages qui rappelle les grandes encycliques des papes sur les signes des temps. C’est indubitablement une encyclique majeure qui viendra appuyer la Conférence de Paris en décembre sur le réchauffement climatique, la COP21. Mais ce document, adressé à tous et qui résulte de la contribution de nombreux experts, dépasse le cadre technique et scientifique des sommets internationaux sur le climat.
Un des grands textes du pontificat
Le pape François demande aux pays riches de revoir leurs modèles économiques et consuméristes violents pour l’homme et l’environnement, et dont les pays pauvres paient au prix fort la facture, notamment à travers le dérèglement climatique. Selon lui, plusieurs parties du monde doivent même accepter une «certaine décroissance». «Car c’est l’homme et non la nature qui est à la source du réchauffement climatique», pointe du doigt le pape François, se positionnant clairement face aux climato-sceptiques.
Précise, rigoureuse, au style parfois tranchant, et défendant les plus faibles et la nature, l’encyclique porte la marque du pape argentin et restera un des grands textes de son pontificat.