Ukraine: les habitants de l’Est tentent de fuir par le train

Les combats gagnent en intensité dans l'est de l'Ukraine. A Donetsk, les tirs de roquette et les explosions se rapprochent du centre-ville. La population vit dans la crainte d’un assaut de l’armée pour déloger les séparatistes qui ont fait de la capitale du Donbass leur place forte. Les combats dans la région perturbent aussi la circulation des trains, alors que des centaines de personnes fuient la ville.

Avec nos envoyés spéciaux à Donetsk, Boris Vichith et Anastasia Becchio

Des tirs nourris retentissent dans le quartier voisin. La tension et la lassitude se lisent sur les visages. Au milieu des sacs et des valises, les passagers attendent le train numéro 37 qui ne vient toujours pas. Il est retenu dans la zone de combats. Les esprits s’échauffent lorsqu’un énième report du train est annoncé.

Le train part avec huit heures de retard sur l’horaire prévu. Ses passagers sombrent dans le sommeil, soulagés. Maria Ivanovna, la responsable du wagon, fait chauffer le samovar pour le thé. Un long trajet l’attend, l’itinéraire a été modifié pour éviter de passer trop près des zones de combats. Mais plus l’étau se resserre, plus il est difficile de trouver des zones de contournement, d’autant plus que la situation sur le terrain est très changeante. Il arrive aussi que des ouvrages des ponts, des rails, des câbles électriques, soient endommagés par des tirs. Et en dépit de toutes les précautions prises par les responsables des chemins de fer, il arrive que des roquettes passent tout près des trains. « On entend déjà tirer là-bas, dit-elle, je ne sais pas s'ils tirent des obus ou autre chose. Bien sûr, il m’arrive d’avoir peur. Les gens sont tous effrayés. Ils fuient, y compris avec leurs animaux. Oui, ils prennent leurs chiens, leurs chats, ils prennent tout avec eux ».

Dans le compartiment d’à côté, un jeune couple est installé, avec un nourrisson de trois semaines. « On a pris la décision de prendre le train aujourd’hui même, raconte-t-il. En un jour, on a ramassé toutes nos affaires. Hier, c’était très tendu. Ca tirait de partout, il y avait des explosions, c’était effrayant. On ne pouvait plus dormir. Notre enfant est très petit ».

Le centre-ville de Donetsk quasiment vide

Les habitants de Donetsk se préparent à un assaut imminent des forces ukrainiennes. La tension est de plus en plus vive. La ligne de front n’est plus qu’à quelques dizaines de kilomètres de la ville. Les forces ukrainiennes tentent de la prendre en étau.

Les larges avenues du centre-ville de Donetsk sont quasiment vides, même si les transports en commun continuent de fonctionner. Beaucoup de magasins sont fermés. On entend régulièrement des détonations, il y a des combats dans les quartiers périphériques. Et paradoxalement, dans ces quartiers-là il y a un peu plus de vie ; des personnes âgées ou de jeunes vendeuses qui racontent que si elles lâchent leurs commerces elles n’ont plus aucun moyen de subsistance.

Dans les magasins qui sont encore ouverts ; pas de pénurie pour l’instant. Mais les signes de la guerre sont bien réels. On voit beaucoup de maisons à moitié détruites, des immeubles aux vitres soufflés sur près de dix étages, des cratères faits par les obus sur les trottoirs. Les gens passent leurs nuits dans les caves et ceux qui repoussaient leur départ commencent à chercher des moyens de s’enfuir rapidement en voiture, mais il faut passer les barrages séparatistes et les lignes de front, ou encore en train.

Et en train, au bout de 14 heures éprouvantes, la délivrance de l’arrivée à Kiev.

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