Ukraine: reprise des combats dans l’Est après l’élection de Porochenko

Tandis qu’à Kiev, Petro Porochenko, élu président ukrainien dimanche, a fixé au rang de ses priorités de mettre un terme à la guerre en cours dans l’est du pays, les affrontements continuent. A Donetsk, l’aéroport a été fermé après un raid mené par des séparatistes qui ont pris le contrôle de la gare.

Avec nos envoyés spéciaux à Kiev, Anastasia Becchio et Mathias Taylor, à Donetsk, Laurent Geslin et à Moscou, Murielle Pomponne

Petro Porochenko s’est imposé dès le premier tour de la présidentielle ukrainienne, ce dimanche. Il enregistre 54 % des voix, selon des résultats encore provisoires. Loin devant les autres candidats. L’ex-Première ministre Ioulia Timochenko a plafonné à 13 %. Ce lundi matin, au cours d’une grande conférence de presse, le futur président a tenu à se poser en rassembleur, avant de préciser les priorités de sa stratégie pour mettre fin à la guerre dans l'Est séparatiste et conduire son pays sur la voie de l'intégration européenne.

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Petro Porochenko a formulé le vœu que la Russie soutienne ses efforts pour régler la situation dans l’est. Il espère rencontrer les dirigeants russes dans la première quinzaine de juin. Auparavant, il aura effectué sa première visite à l’étranger, très probablement chez son voisin polonais, où le président Bronislaw Komorowski l’a invité pour le 4 juin. « L'Europe reste bien une priorité », a insisté Petro Porochenko, précisant que « 85 % des électeurs ont apporté leurs voix à des candidats qui soutiennent le rapprochement avec l'Union européenne ».

Le vainqueur de la présidentielle, à laquelle n’ont pas pu participer une majorité des électeurs des régions troublées du Donbass, entend dialoguer avec les séparatistes qui déposeront les armes. Le milliardaire se battra pour gagner la confiance de ces régions russophones, dans lesquelles, souligne-t-il au passage, il est arrivé en tête. Une victoire toute relative, puisque seuls 17 % des électeurs ont pu voter dans les régions de Donetsk et Lougansk. Mais Petro Porochenko veut y voir un signe : il sera, espère-t-il, le dirigeant qui rassemblera l’est et l’ouest du pays.

Combats à Donetsk ce lundi

Mais s’il prône le dialogue, Petro Porochenko n’aura pas de clémence envers ceux qu’il appelle « les terroristes », qui « menacent la sécurité du pays » : l’opération militaire va donc se poursuivre. La situation sur le terrain est d’ailleurs toujours très tendue. C'est en début d'après-midi que l'armée ukrainienne a décidé de passer à l'offensive pour reprendre le contrôle de l'aéroport de Donetsk, que des dizaines de séparatistes avaient investi dans la matinée, annonce notre envoyé spécial, Laurent Geslin, qui signale aussi que des avions de chasse ont survolé la ville et que des hélicoptères ont bombardé le terminal, sans qu'il soit possible pour le moment d'évaluer le nombre de victimes.

Lavrov « prêt au dialogue », avec conditions

Un appel accueilli avec prudence, côté russe. Moscou a salué l’élection de Petro Porochenko comme un fait positif, même si le ministre russe des Affaires étrangères estime que le scrutin « ne s’est pas parfaitement déroulé », rapporte notre correspondante à Moscou, Murielle Pomponne. « Nous sommes prêts au dialogue avec les représentants de Kiev, avec Petro Porochenko », a indiqué Sergueï Lavrov. Un dialogue que le ministre russe veut voir se dérouler « sur un pied d'égalité, basé sur le respect de tous les accords, en particulier dans le domaine commercial, économique et gazier et en ayant en vue la recherche de solutions aux problèmes existant actuellement entre la Russie et l'Ukraine ».

Moscou espère que le nouveau pouvoir de Kiev va mettre fin à l’opération antiterroriste dans l’est du pays, dont la poursuite, constituerait une « erreur colossale », selon Sergueï Lavrov. Moscou demande à Kiev d’entamer sans tarder des discussions avec les régions de l’est et du sud, sur la base de la feuille de route définie par l’OSCE. 

Ianoukovitch « respecte le choix » de ses concitoyens

Les télés russes ont d'abord eu tendance à mettre en exergue la violence, et donc la non-légitimité du scrutin. Mais, finalement, la plupart des médias reconnaissent l'élection de Porochenko, même s'ils mettent souvent en doute le taux de participation. Même point de vue exprimé par l’ancien président ukrainien, Ianoukovich, qui affirme, depuis son exil russe, « respecter le choix de ses concitoyens ». Il estime toutefois que la participation du sud-est du pays est « nécessaire » pour la légitimité des élections et la légitimité du président lui-même.

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