Avec notre correspondant à Kiev, Sébastien Gobert
Les Américains comptent « aider » l'Ukraine pour l’organisation de la présidentielle du 25 mai. Ils vont aider et ils vont aider sur le long terme. C’est en substance le message délivré par le vice-président des Etats-Unis ce mardi matin.
L’Ukraine fait face à ce que Joe Biden dénonce comme des « menaces humiliantes » venues de Russie et il a annoncé une aide financière et technique pour la modernisation des institutions d’Etat et une décentralisation du pouvoir, pour soutenir l'économie ukrainienne, en profonde récession, ainsi qu'accroître l’indépendance énergétique de l’Ukraine vis-à-vis du gaz russe. Ce soutien est soumis à une condition essentielle : que le nouveau gouvernement ukrainien combatte fermement le « cancer » de la corruption afin de ne pas répéter l’échec de la « révolution orange ».
Joe Biden a insisté sur l'enjeu de l'élection présidentielle du 25 mai, « peut-être l'élection la plus importante de l'histoire de l'Ukraine », a -t-il dit. Washington accorde à Kiev une aide qui atteint l'équivalent de 50 millions de dollars, dont un cinquième est destiné au bon déroulement de l'élection présidentielle du 25 mai. Du matériel militaire non létal, comme des véhicules ou des appareils de transmission radio, sera livré à l'Ukraine pour un montant de près de 6 millions d'euros. Ces sommes ne sont pas très importantes par rapport aux besoins des autorités de Kiev, mais les Etats-Unis se sont déjà engagés à garantir de prêts à l'Ukraine d'un montant de plus de 750 millions d'euros.
L'accord de Genève de plus en plus anecdotique
Joe Biden a rencontré à huis clos le président ukrainien par intérim Olexandre Tourchinov, avant un entretien avec le Premier ministre Arseni Iatseniouk. Dans une conférence de presse avec Arseni Iatseniouk, Joe Biden a, entre autres, demandé à la Russie de cesser de soutenir les séparatistes pro-russes dans l'est de l'Ukraine.
« Aucune nation ne doit menacer son voisin en rassemblant des troupes le long de la frontière, a assuré Joe Biden. Nous demandons à la Russie de retirer ses troupes. Aucune nation ne doit provoquer de l’instabilité dans le pays voisin. »
« Nous demandons à la Russie de cesser de soutenir des hommes qui se cachent derrière des masques, qui portent des uniformes non identifiés et qui provoquent une insurrection dans l'Est de l’Ukraine. Nous avons été clairs : plus la Russie se comporte de façon provocatrice, plus elle risque d'en subir le coût et sera isolée », a ajouté M. Biden.
Joe Biden a évoqué de nouvelles sanctions contre la Russie et il semble encore vouloir croire à l’application des accords de paix de Genève du 17 avril. Mais sur le terrain, ces accords restent lettre morte et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a annoncé lundi qu’il recevait de plus en plus de demandes pour dépêcher une aide militaire russe dans l’Est de l’Ukraine. Il faudra donc plus que les déclarations de principe de Joe Biden pour changer la donne.
« Nous ferons face aux sanctions, et nous gagnerons »
Moscou continue à montrer les muscles dans ce bras-de-fer à l'image de Dmitri Medvedev qui a affiché ce mardi matin, devant le Parlement, une totale confiance face à la perspective de nouvelles sanctions.
Avec notre correspondante à Moscou, Muriel Pomponne
« C'est une voie sans issue, mais si certains de nos partenaires occidentaux décident tout de même de s'y engager, nous y ferons face, et nous gagnerons ». Dimitri Medvedev a précisé que les secteurs les plus vulnérables aux sanctions, comme celui de la défense ou des biens d'équipement, recevraient du gouvernement « le soutien nécessaire ».
« Nous ne renonçons pas à la coopération avec des entreprises étrangères. Mais nous serons prêts à faire face à des mesures inamicales », a-t-il poursuivi. « L’Union européenne est notre principal partenaire économique, mais nous réduirons la perte de ce marché en exploitant mieux le potentiel de la région Asie Pacifique », a ajouté le Premier ministre. Il a promis que les citoyens russes ne souffriraient pas des sanctions, que les prestations sociales n’allaient pas diminuer et que les impôts n’augmenteraient pas.
Toutefois, il a avoué que la crise montrait la vulnérabilité de l’économie russe qui n’est pas assez diversifiée, avec un manque de personnel qualifié. Mais il maintient pour 2014 un objectif de croissance supérieur à 1% alors que le ministre des Finances russe parle déjà de récession, avouant ainsi que, en dépit de propos confiants, la crise ukrainienne et les sanctions pèsent sur l'économie du pays.