Avec nos envoyés spéciaux à Donetsk, Anastasia Becchio et Boris Vichith
L’armée ukrainienne a bien du mal à faire face à des insurgés pro-russes déterminés à poursuivre leur offensive… Cette nuit, des manifestants armés ont attaqué une base de la garde nationale ukrainienne dans la ville de Marioupol près de la mer d'Azov, non loin de la frontière russe. Les insurgés y occupent déjà plusieurs bâtiments administratifs. Le ministère ukrainien de l’Intérieur annonce ce jeudi matin que trois miliciens pro-russes ont été tués dans l’attaque. On compte également treize blessés et une cinquantaine d’assaillants ont été capturés selon le ministre de l’Intérieur Arsen Avakov.
Le président par intérim, Oleksander Tourtchinov, a annoncé le bilan de ces violences au Parlement : « Les malfaiteurs ont subit une contre-attaque de la garde nationale. Trois malfaiteurs ont péri, treize ont été blessés et soixante-trois ont été capturés. Les autres se sont enfui et sont actuellement recherchés par la police. »
Devant l'entrée de la garde nationale, des policiers effectuaient ce jeudi des relevés et des mesures des douilles qui jonchaient le sol. « Ca tirait de partout ! Pourquoi on nous traite comme ça ?, interroge Véra, une riveraine qui a été réveillée par les détonations. Moi, je vis ici depuis 50 ans, et maintenant je suis quoi ? Une séparatiste ? Je ne suis pas une séparatiste ! J'aimais l'Ukraine, j'en étais fière, mais maintenant je peux vous dire que je la déteste ! Ma petite fille se réveille ce matin et dessine un tank : c'est pas possible ! » Comme beaucoup d'habitants de la cité dortoir délabrée où se trouve la caserne attaquée, Véra rejette la responsabilité des violences sur de mystérieux provocateurs venus de Kiev.
De son balcon du quatrième étage, une retraitée effrayée, acceptant tout juste d'entrouvrir sa porte, a une toute autre version des faits. « De nombreux gens ont afflué, raconte-t-elle. Ils n'étaient pas d'ici. Ils ont enfoncé les portes métalliques et ont commencé à lancer des bombes incendiaires, à tout casser, à crier, à jurer. C'étaient des nouveaux venus à mon avis, des Russes. Ils avaient une manière de parler moscovite. » Le ministre de l'Intérieur ukrainien affirme de son côté que les forces de l'ordre ont saisi des armes et des téléphones portables d'opérateurs russes.
Dans le nord de la cette région du Donbass, l’armée a connu hier mercredi des heures difficiles à Kramatorsk, ville où une colonne de 15 blindés s’est retrouvée coincée hier par la population le long d’une voix ferrée.
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Armée ukrainienne bloquée à Slaviansk et Kramatorsk
Les soldats, de jeunes parachutistes venus de Dnipropetrovks, autre grande ville de l’Est, sont restés assis sur leurs chars, de longues heures, un peu hagards et démunis, le temps que leurs supérieurs finissent pas trouver un accord avec la population locale, très remontée. Un à un, les soldats ont fini par remettre le percuteur de leur mitraillette à des miliciens pro-russes, qui les ont ensuite laissés repartir.
« La 25ème brigade parachutiste, dont les militaires ont fait preuve de lacheté et ont rendu leurs armes, sera dissoute, a annoncé le président par intérim, Oleksander Tourtchinov. Les militaires qui en sont responsables rendront des comptes devant les tribunaux. Des mesures appropriées en la matière seront prises par le ministère de la Défense et par le procureur général. »
Auparavant six blindés avaient été saisis près de Slaviansk, autre place forte des pro-Russes. Les humiliations s’accumulent donc, pour cette armée ukrainienne qui a bien du mal à faire face à des insurgés, visiblement bien organisés. On a vu apparaître notamment des hommes en uniforme vert, encagoulés et équipés d’armes automatiques dernier cri. Des hommes qui ressemblent comme deux gouttes d’eau à ceux qui avaient pris le contrôle de la Crimée le mois dernier.