Déroute de l'armée ukrainienne dans l'Est du pays

Le gouvernement ukrainien a essuyé hier, mercredi 16 avril, une série d'échecs dans l'Est, où les militaires sont censés mener une opération antiterroriste contre les insurgés pro-russes qui occupent de nombreux bâtiments gouvernementaux et se sont emparés de postes de polices et de leurs armes.

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► A la sortie de Kramatorsk, de part et d'autre d'une voie ferrée, une quinzaine de tanks sont immobilisés et entourés par la population locale pro-russe mercredi. Les soldats portent l'insigne de l'armée ukrainienne et sont assis calmement sur les blindés. « Ils ont envoyé des tanks dans notre village pacifique ! Nous sommes tous venus et nous avons vu la scène. Il y en avait environ 30 ! Nous avons réussi à en bloquer une partie, en faisant office de boucliers humains » explique Antonina, habitante du coin, venue soutenir les manifestants à notre envoyé spécial Damien Simonart.

Au fur et à mesure de la journée, le dialogue s'est installé entre les soldats et les habitants. « Pourquoi faites-vous cela ? » demande l'un d'entre eux. « Parce que si je ne le fais pas je risque cinq ans de prison » lui répond le soldat. Le lieutenant Sergei Mychka obéit aux ordres mais il sait garder son sang froid. « On ne tirera pas sur des gens, c'est sûr ! On ne tirera pas sur des Ukrainiens. Je ne vais pas rentrer dans toutes les subtilités du code militaire. On a des règles très précises. Dans certains cas, on peut utiliser nos armes mais personne n'a l'intention de tirer sur les gens. »

En fin de journée, les négociations finalement aboutissent. Les soldats acceptent de rendre le percuteur de leurs fusils pour s'auto-neutraliser. Sous les applaudissements de la foule, les tanks quittent un à un la zone, sous les yeux de soldats en uniforme sans signes distinctifs qui pourraient provenir de Russie.

► A une vingtaine de kilomètres de là, à Slaviansk, des centaines d'habitants ont accueilli en triomphe six blindés, rapportent nos envoyés spéciaux Anastasia Becchio et Boris Vichith. Ils ont été abandonnés par des militaires ukrainiens et de mystérieux soldats venus renforcer le camp pro-russe. « Lui c’est un gentil soldat » dit une jeune femme poussant son garçonnet blond dans les bras d’un milicien pour une photo souvenir. L’enfant se laisse faire, mais semble impressionné par l’attirail du grand gaillard : cagoule noire, Kalachnikov en bandoulière et lance-roquettes dans le dos.

L’équipement et l’uniforme vert, sans signes distinctifs, est le même que celui porté par les miliciens pro-russes de Crimée. « Vous êtes des héros ! » Des centaines d'habitants de Slaviansk viennent féliciter ces mystérieux hommes verts armés et photographier ces blindés abandonnés un peu plus tôt par les soldats ukrainiens, sur lesquels ont été plantés des drapeaux russes. « Quand on a entendu le bruit des chars, on a d'abord eu peur... mais quand on a vu le drapeau russe, on a été soulagés, explique Natalya. Parce qu'on sent que ces gens sont plus proches de nous que les militaires ukrainiens... ces gens là ne nous veulent pas de mal, alors que les autres, on en a peur ». « Les autres », pour Natalya, c'est l'armée ukrainienne et le gouvernement de Kiev, qui refuse toujours d'idée d'un référendum d'autodétermination demandé par la région du Donbass, qui semble de plus en plus lui échapper.

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