Les travailleurs détachés, un dossier majeur pour l’Union européenne

C'est ce lundi 9 décembre 2013 que les ministres européens du Travail se réunissent à Bruxelles pour évoquer la situation des travailleurs détachés au sein de l’Union, ces ouvriers étrangers qui viennent vendre leur force de travail à bas salaire. Un accord a finalement été trouvé en fin de journée, mais peu d'informations sur son contenu ont filtré.

Depuis 1996, le régime de ces travailleurs est encadré par une directive européenne, mais on observe aujourd'hui de nombreux abus. On compte aujourd'hui près de deux millions de travailleurs détachés. Les deux premières économies de la zone euro sont particulièrement touchées. La France, par exemple, compte plus de 150 000 ouvriers étrangers. Mais si on tient compte des travailleurs non déclarés, ce chiffre est multiplié par deux. L'Allemagne en totalise le double.

En tête des nationalités, on trouve les Polonais, les Portugais, les Roumains et les Bulgares. Le bâtiment est le premier secteur concerné, avec un tiers des travailleurs détachés, suivi de l'industrie et du travail temporaire. L'agriculture fait, également, appel à cette main-d'œuvre.

Dumping social

Très contestée, la directive actuelle autorise tout employeur à faire travailler des citoyens européens à condition de respecter le noyau dur des règles du pays d'accueil, et de verser les cotisations sociales dans le pays d'origine. Mais les règles encadrant ce principe sont souvent bafouées. Et les abus très nombreux. Cela crée, en toute légalité, des distorsions de concurrence. Ces travailleurs détachés sont, en effet, payés beaucoup moins cher. Et les charges sociales qui leurs sont appliquées, sont souvent minimes, jusqu'à 30 % moins élevées. Ce qui aboutit à un dumping social au sein de l’Union européenne et déstabilise des secteurs d'activités entiers.

Paris et Berlin veulent lutter contre ces dérives, mais ce n'est pas le cas de tous les pays européens. La France et l'Allemagne militent pour la mise en place d'une nouvelle directive qui renforcerait les contrôles. Avec pour objectif que chaque pays décide lui-même les documents que l'on peut exiger d'une entreprise employant ces travailleurs détachés. Ils souhaitent également responsabiliser toute la « cascade » de sous-traitants qui masque plus facilement les abus et mettre en place une Agence européenne de contrôle du travail mobile.

Opposition des pays de l’Est

Cette position est soutenue par la Belgique, le Luxembourg et l'Italie et par la Confédération européenne des syndicats. Mais le Royaume-Uni, la Pologne et les pays d’Europe centrale bloquent l’adoption de ce nouveau texte. Le Premier ministre britannique David Cameron a réaffirmé son opposition à un durcissement de la réglementation. Quant aux pays de l'Est, ils combattent toute restriction à la libre circulation de leurs travailleurs.

Face aux dissensions des vingt-huit, plusieurs pays ont décidé de renforcer dès à présent leur arsenal législatif. En France, un plan national de lutte contre la fraude est sur la table. Il prévoit de multiplier les contrôles des inspecteurs du travail. En Belgique, le gouvernement a approuvé, la semaine dernière, un plan d'action.
 

→ A LIRE : Rapport du Sénat - Les travailleurs détachés, des travailleurs low cost ?

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