Meurtre de Woolwich: horreur, mystères et questions

La Grande-Bretagne est sous le choc. Elle a perdu un soldat, mais cette fois il ne s’agit pas d’un soldat mort au combat. Le militaire portait des vêtements civils quand il a été sauvagement assassiné en pleine rue, dans le quartier Woolwich au sud-est de Londres. En plus des deux hommes qui ont rapidement été arrêtés, la police britannique a annoncé ce jeudi 23 mai avoir interpelé un homme et une femme, soupçonnés d’implication dans le meurtre.

Le choc est d’autant plus grand que c’est le premier assassinat à mobile apparemment islamiste depuis les attentats de Londres en juillet 2005, qui avaient fait 52 morts et des centaines de blessés. Ce qui a particulièrement frappé les esprits, c’est le comportement brutal, mais en même temps très étonnant, des assassins. Le maire de Londres n’a pas hésité de parler de personnes à « l’esprit tordu et dérangé ».

Face à une telle barbarie -rappelons que les assassins tentaient de décapiter leur victime en pleine rue-, l’opinion publique se pose presque automatiquement des questions sur la santé mentale des auteurs du crime. Beaucoup de gens se disent : « Mais c’est impossible que quelqu’un sain d’esprit puisse commettre de telles atrocités ». C’est évidemment aux médecins et aux enquêteurs de trouver des réponses à ces interrogations. Au stade actuel, on ne peut que constater les faits connus publiquement et poser des questions.

Acte de folie ?

Nous savons que la victime était un soldat en civil. Nous savons également que les meurtriers se rendaient parfaitement compte de sa qualité de militaire, malgré ses vêtements civils. Ainsi, plusieurs questions se posent. Les assassins l’avaient-ils pris pour cible depuis un certain temps déjà ? S’agit-il donc d’une opération minutieusement planifiée et préparée ? Les deux personnes interpellées sont-elles les seules impliquées dans la planification et dans l’exécution de l’attaque ?

Si les réponses à ces questions conduisent à révéler une opération préparée de longue date par plusieurs personnes, l’hypothèse d’un acte de folie deviendrait hautement improbable. L'annonce par les autorités britanniques, ce jeudi soir, de l'arrestation d'un homme et d'une femme, âgés tous les deux de 29 ans et soupçonnés d'avoir participé à la préparation du meurtre, semble aller dans ce sens.

Toutefois, d'autres faits sont également connus. Nous savons que le comportement des assassins au moment du drame était particulièrement brutal et cruel. Leur comportement après le drame était presque aussi bouleversant, mais pour d’autres raisons.

Volonté de se montrer

En effet, les meurtriers pouvaient facilement fuir les lieux du crime, mais ils ne l’ont pas fait. Bien au contraire, ils invitaient les badauds à appeler la police, à filmer la scène du crime, à enregistrer leurs déclarations enflammées en faveur des musulmans et contre le gouvernement britannique. Et puis, cette scène hallucinante : l’un des meurtriers tenant des couteaux ensanglantés dans sa main et parlant tranquillement avec deux femmes venues se positionner au niveau du corps sans vie et questionner l’un des criminels sur les raisons de son acte.

Les assassins se comportaient comme s’ils ne voulaient pas se protéger, comme s’ils souhaitaient s’exposer le plus possible aux médias, à l’opinion publique. Alors, une fois encore, des questions se posent. Comment expliquer un tel comportement, très spectaculaire, mais quelque part suicidaire ? S’agit-il des effets d’un fort endoctrinement islamiste ? S’agit-il d’un délire nourri par des contenus trouvés sur internet ou ailleurs ? Une tierce personne aurait-elle réussi à manipuler des personnes à tendances psychotiques ou psychopathiques ? En l’état actuel de la connaissance des faits, difficile à dire...

Piste nigériane ?

Un autre fait semble être déjà confirmé : l’origine nigériane des assassins. Est-ce une piste valable, explorable ? Certainement pas au stade actuel de l’enquête, même purement journalistique. Le seul assassin dont l’identité soit connue publiquement, Michael Adeboloja, est né en Grande-Bretagne il y a 28 ans, de parents nigérians. De là à parler d’une quelconque « piste nigériane », on en est pour le moment vraiment très loin. Adeboloja parle anglais, comme tous les autres Londoniens. Est-ce que ses origines familiales pouvaient faciliter des contacts et/ou des manipulations de la part de réseaux islamistes actifs au Nigeria ? C’est l’une des nombreuses hypothèses possibles. Mais rien, pour l’instant, ne permet de la confirmer.

Certes, les services de sécurité britanniques indiquent que les deux hommes étaient déjà connus. Mais ils ne disent pas encore pour quelles raisons précises. En tout cas, ils ne les considéraient pas comme une réelle menace pour la vie des autres.

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