Enrico Letta a donné le ton dès le début de son discours : « Les politiques de relance de la croissance ne peuvent plus attendre », l’Italie « se meurt » à cause des politiques d'austérité. Il a souligné que « l'Europe est en crise de légitimité (...) au moment où les citoyens en ont le plus besoin, elle doit redevenir un moteur de croissance durable ».
L'Italie « respectera les engagements » mais elle espère avoir une marge de manœuvre pour pouvoir financer sa politique de relance économique. Enrico Letta est un fervent européen, il se dit même fédéraliste. Pour le jeune président du Conseil, la réponse aux problèmes de l'UE « est dans une plus grande intégration qui mène vers une Europe fédérale ».
Pour défendre ses idées européennes, il s’est même fait lyrique. « Le port vers lequel nous nous dirigeons, a-t-il dit, s'appelle les Etats-Unis d'Europe et notre navire est la démocratie ». Sans surprise, ses premiers déplacements seront Bruxelles, Berlin et Paris.
Un programme développé devant les parlementaires
Enrico Letta a rappelé que le parti qui a gagné les élections est celui de l’abstention. Pour tenter de réconcilier les Italiens avec leur classe politique, le premier acte de son gouvernement sera de supprimer le salaire des ministres qui sont également parlementaires. Pour créer des emplois, lutter contre le chômage des jeunes et soutenir les petites et moyennes entreprises, il veut réduire le coût du travail en allégeant la pression fiscale.
Il a annoncé également l'abolition, dès le mois de juin, de la taxe sur les résidences principales introduite l'an dernier par le gouvernement de Mario Monti. Silvio Berlusconi a fait de la suppression de cette taxe appelée IMU, une des conditions de son soutien au gouvernement d’Enrico Letta.
Une décision qui va peser lourd sur le budget. Cette taxe devait rapporter huit milliards d'euros cette année dans les caisses de l'Etat. Il a néanmoins promis de s'attaquer à la pauvreté, « nous pourrons étudier des formes de revenu minimum pour les familles démunies avec des enfants en bas âge, ainsi que des propositions d'incitations à l’embauche des jeunes dans les régions les plus défavorisées ». Toujours dans le but d’alléger la fiscalité, il veut supprimer les provinces italiennes. Une réforme que son prédécesseur Mario Monti avait entamée.
L’autre priorité : la réforme des institutions et du code électoral
Enrico Letta a promis une réforme de la loi électorale qui n’a pas permis de dégager une majorité claire au Parlement. « Nous devons nous engager solennellement à faire en sorte que la consultation parlementaire des 24 et 25 février soit la dernière organisée en vertu de la loi électorale actuelle ».
Une convention sera mise en place pour réfléchir à une nouvelle loi constitutionnelle qui renforcerait la stabilité du gouvernement. Si cette convention ne devait pas voir le jour, il en tirerait les conclusions : « Dans 18 mois, je vérifierai si les réformes arrivent à bon port. Si tout s'enlise, j'en tirerai les conséquences ».
La composition du gouvernement saluée par la presse et les marchés
Pour mener à bien son programme, il pourra compter sur les membres de son gouvernement dont la compétence, la jeunesse et le nombre de femmes, beaucoup de femmes, plus qu'il n'y en a jamais eu dans un gouvernement italien. Sept femmes dont une est issue de la diversité, c'est la première femme d’origine africaine ministre, elle s'appelle Cécile Kyenge. Elle a 49 ans. Ministre de l’intégration, elle veut remplacer le droit du sang par un droit du sol. Pour elle, un enfant d’immigré qui est né en Italie et a été formé en Italie doit être un citoyen italien, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Un soutien particulier : Gianni Letta, l'un des hommes les plus influents en Italie
Enrico Letta est le neveu de l'éminence grise de Silvio Berlusconi, Gianni Letta. Cet ancien journaliste a été le bras droit du « Cavaliere » pendant toute sa carrière. Certains n'hésitent pas à dire que « Berlusconi a les tripes et Letta un cerveau ».
L’influence de son oncle n’est donc pas négligeable y compris sur la formation du gouvernement qui fait la part belle aux membres du Peuple de la liberté, le parti de Berlusconi. Beppe Grillo considère que son gouvernement est digne du meilleur Bunga Bunga. C’est finalement au sein de son propre parti, le Parti démocrate, qu'Enrico Letta risque de rencontrer le plus de difficultés. Il incarne l’aile droite de ce parti de gauche.