En entrant dans le panthéon de l’Eglise, Jean Paul II rejoint les nombreux papes qui ont été faits avant lui bienheureux. Mais sa béatification est tout sauf une « formalité » vaticane. L’Eglise veut faire de Karol Wojtyla un exemple pour notre temps. Jean Paul II fut un pape d’exception.
C’est pourquoi sa béatification a échappé aux règles ordinaires. La période de cinq ans pour l’ouverture du procès a été ramenée à deux mois. Il faut dire que le culte Jean Paul II avait déjà commencé le jour de ses funérailles place St-Pierre, avec ces banderoles réclamant comme au Moyen Age la déclaration immédiate de sa sainteté « Santo subito » (Saint tout de suite). A ce moment là, la sainteté du pape polonais est apparue comme une évidence. Evidence aussi pour Benoît XVI qui va appuyer le dossier de tout son poids.
Dans une Eglise souvent raillée, qui vient de traverser une lourde crise dont le grand défi est celui de l’indifférence religieuse en Europe, cette béatification est une bouffée d’oxygène. Elle donne en exemple un pape qui fit de sa vie et de son pontificat une croisade au service de l’homme.
Un sens aigü de la communication
Doué de talents multiples, à la fois homme de prière et d’action, Jean Paul II a mis la puissance de sa vie intérieure et son sens aigu de la communication au service de cette mission. Une force puisée dans la ferveur d’un catholicisme polonais traditionnel mais aussi dans les drames politiques du 20e siècle, le nazisme et le communisme, vécus par son pays natal, et qui feront de lui un résistant.
Résistant aux totalitarismes de toute sorte certes, mais le tombeur du communisme, comme on a pu le surnommer, dénoncera avec la même vigueur le relativisme des sociétés occidentales qui font selon lui un usage fallacieux du concept de liberté.
Apôtre de la paix, de l’entente entre les religions, pape du pardon et des demandes de pardon, porte-parole des malades, défenseur des exclus et des pauvres de la planète, pourfendeur du capitalisme sauvage, figure paternelle pour les jeunes à l’intention desquels il a créé les Journées mondiales de la jeunesse, l’aura de Jean Paul II dépassera les frontières du catholicisme.
Un pape qui a aussi ses détracteurs
Toutefois, ses combats lui ont valu aussi des critiques. Ses détracteurs, certes minoritaires, lui reprochent sa rigidité en matière de morale sexuelle, le préservatif dont il s’est gardé de faire la promotion lors de ses voyages en Afrique, préférant alors parler de fidélité et d’abstinence, sa cécité face aux abus des prêtres pédophiles dont il laissera le règlement de l’épineux dossier à son successeur, sa mise au pas en Amérique latine de religieux jugés trop progressistes, sans compter son inflexibilité sur le célibat des prêtres et la place des femmes dans l’Eglise.
Trop « tradi » pour les uns, pas assez pour les autres. Les catholiques de la mouvance de Mgr Lefebvre, eux, n’ont toujours pas digéré la rencontre interreligieuse d’Assise de 1986.
La vie de Jean Paul II et son pontificat de 26 ans, l’un des plus longs de l’histoire de l’Eglise, se résume à un combat qu’il portera de bout en bout dans la plénitude de ses moyens physiques, comme dans la maladie. Paralysé, privé de parole, il fera d’elle un nouveau moyen de communication avec le monde, en montrant que l’homme, dans la force comme dans la faiblesse, demeure toujours digne.