Avec notre correspondant à Varsovie, Damien Simonart
Les premières conversations datent de 8h02, heure française, 10h02 heure russe. Les pilotes du Tupolev 154 sont déjà au courant du brouillard épais qui recouvre Smolensk. A 8h04, une personne non identifiée explique : « Ça va être macabre. On ne va rien voir. » Personne ne réagit. L’ambiance est détendue. A 8h11, le second pilote est confiant : « On voit la terre, on voit quelque chose en bas, il n’y aura peut-être pas de tragédie », plaisante-t-il.
Six minutes plus tard, le commandant de bord se ravise : « Ça ne sent pas bon. Le brouillard est sorti. Ce n’est pas sûr qu’on atterrisse ». 8h23, 18 minutes avant le crash, l’avion est en pleine descente. Les contrôleurs de Smolensk préviennent l’équipage. « Horizon : 400 mètres », avant de renchérir : « Il n’y a pas de bonnes conditions pour atterrir ». Le commandant intervient : « On va tenter une approche, et si la météo ne le permet pas, on se posera ailleurs ».
« Putain de merde ! »
Les minutes passent. Les pilotes apprennent qu’un avion russe a frôlé la catastrophe en tentant en vain de se poser. Les deux dernières minutes sont intenses. A quelques mètres du sol, le système de navigation du Tupolev alerte sans cesse en anglais : « Pull up », « Remontez ! » Message ignoré à maintes reprises par l’équipage. Vingt secondes avant le crash, le second pilote ordonne : « On s’en va » !
Les alarmes sonnent toujours, la tour de contrôle demande la position. Huit secondes plus tard, l’avion percute le premier arbre. Le second pilote crie en polonais : « Kurwa mac ! » « Putain de merde ! ». La tour de contrôle ordonne : « Départ vers un autre aéroport ». Dans l’avion, un autre cri : « Kurwaaa ! » Et puis le silence radio. Le Tupolev se désintègre dans la forêt avec les conséquences que l’on connaît.