Entre les deux Corées, l’apaisement

Comme chaque vendredi, nous retrouvons la chronique de Bruno Daroux, Le Monde en Questions. On revient cette semaine sur le sommet qui vient de réunir en Corée du Nord le président sud-coréen et son homologue du Nord Kim Jong-un. Avec en toile de fond, les négociations sur la dénucléarisation avec les Etats-Unis Et la question que vous posez, Bruno, est la suivante : peut-on être optimiste à l’issue de ce sommet ?

Et bien on peut répondre oui, mais avec modération.

Oui, car sur les deux enjeux de ce sommet, la dénucléarisation nord-coréenne et la relation bilatérale entre Séoul et Pyongyang, le ton est positif, les images symboliques sont fortes, et quelques avancées incontestables.

Mais il faut rester prudent en attendant la suite.

Sur la relation bilatérale, la venue en Corée du Nord de Moon Jae-in a été une réussite, avec notamment cette photo historique sur le Mont Paektu, considéré comme le berceau de l’identité de la Corée – Nord et Sud confondus. Mais, au-delà des sourires et de belles images, il y a eu aussi des annonces concrètes pour diminuer la tension militaire entre les deux états.

Tout cela est bel et bon. Et permet aux deux dirigeants de poursuivre leurs objectifs : pour Moon Jae-in, il s’agit de parvenir à une péninsule coréenne pacifiée. Kim Jong-un cherche lui à pérenniser l’existence de la Corée du Nord, mais en paix, et surtout il cherche à attirer les investisseurs étrangers et notamment sud-coréens pour relancer son économie exsangue. Il faudra voir si cet apaisement est pérenne.

La dénucléarisation de la Corée du Nord

Sur le dossier de la dénucléarisation de la Corée du Nord, là aussi il y a eu des annonces fortes, à commencer par le souhait de Kim Jung-un de rencontrer à nouveau au plus vite le Président Trump pour relancer les négociations sur la dénucléarisation. Washington a commencé à réagir : Mike Pompéo, le chef de la diplomatie américaine, dit qu’il souhaite que les négociations soient achevées en janvier 2021. C’est-à-dire à la fin du mandat de Donald Trump. Ce qui est peut-être très optimiste.

Même s’il y a, d’ores et déjà, des avancées sur ce dossier. D’abord, depuis novembre 2017, la Corée du Nord a gelé ses essais nucléaires – c’est le résultat le plus concret obtenu jusqu’ici.

Il y a donc les annonces que vient de faire Kim Jong-un. Pyongyang accepte de «fermer de façon permanente» son site de tests de moteurs de missile de Sohae en présence d'experts internationaux. Annonce concrète là aussi, mais qui n’épuise pas, selon les spécialistes, les capacités de tirs de missiles nord-coréens. Il y a cet engagement à fermer son complexe nucléaire de Yongbyon, si Washington prend « des mesures réciproques ». Tout est dans le « si ».

Par mesures réciproques, la Corée du Nord entend une déclaration officielle des États-Unis pour marquer la fin de la guerre de Corée, qui s'est achevée en 1953 sur un simple armistice. Ça avance, mais doucement. Car en fait, les Américains n’ont toujours pas la liste détaillée des installations et des capacités de production nucléaire de la Corée du Nord. Et cette dernière attend une déclaration des États-Unis et surtout un allègement des sanctions qui étranglent son économie, et n’a obtenu aucun signe de Washington dans ce domaine.

L’optimisme mesuré reste donc de rigueur, puisque le cœur des négociations n’est toujours pas abordé.

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