La France veut durcir la directive sur le travail détaché

Sous la pression de la France, l’adoption de la réforme du travail détaché proposée par la Commission est reportée à l’automne. Ce matin devant le Conseil européen des affaires sociales à Luxembourg Paris a présenté une version plus musclée du texte initial.

La Commission a prévu de limiter le travail détaché à 24 mois. Pour la France c’est 12 mois maximum. La Commission souhaite une même rémunération pour un même travail, Paris précise : plus question de gonfler les salaires avec les frais de repas ou de résidence, le salaire net, primes comprises, doit être identique à celui des locaux.

Enfin, la France veut surtout une coopération entre Etats pour traquer la fraude. Afin d’identifier les sociétés-écrans installées dans des pays mieux-disants et afin de détecter les affiliations abusives à la sécurité sociale.

La directive datant de 1996 est inadaptée à l’Europe d’aujourd’hui

La directive définissant leurs conditions de travail est sortie en 1996 dans une Europe à quinze. L’élargissement de 2004 a transformé ce texte protecteur en outil de dumping social. Le phénomène du travail détaché a explosé au début des années 2010.

À travers toute l’Europe, 1,9 million de salariés sont maintenant concernés. Mais personne ne sait vraiment depuis combien de temps ils travaillent sous ce régime et avec quel salaire. En France les Polonais, les Portugais et les Roumains forment aujourd’hui le gros des bataillons de travailleurs détachés.

La Pologne, la Roumanie et la Hongrie font partie des pays les plus hostiles à un durcissement de la directive

A ce trio d’opposants s’ajoute une liste de six États indécis. Cela va de l’Estonie au Portugal en passant par l’Espagne. Madrid veut bien aménager le texte à condition que son application épargne le transport. Car beaucoup d’entreprises espagnoles font du cabotage, c’est-à-dire des livraisons intermédiaires avant de rejoindre leur destination.

Cela rentabilise le voyage et au passage fait une concurrence sévère aux transporteurs locaux, français notamment. Paris voudrait donc que la durée du détachement soit prise en compte dès le premier jour de livraison.

Pourquoi Emmanuel Macron est-il si inflexible sur cette question du travail détaché ?

Le Front national avait fait de la suppression de cette directive l’un des marqueurs de sa campagne pour la présidentielle ; Emmanuel Macron s’est alors engagé à réformer ce texte nécessaire aussi pour les Français travaillant dans les 26 autres pays de l’Union. Au moment où il s’apprête à engager la délicate réforme du Code du travail, il veut tenir sa promesse et démontrer que l’Europe est protectrice. Et c’est justement parce qu’il lance ces réformes nationales que l’Allemagne appuie les propositions françaises sur le travail détaché.

Mais passer en force pourrait fragiliser la belle union des 27 sur le Brexit. Les ministres vont donc passer l’été à arrondir les angles pour trouver un compromis à l’automne au prochain Conseil social prévu en octobre.

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