Grèce: des demandeurs d'asile repoussés de l'autre côté de la frontière

La Grèce a-t-elle repoussé de l’autre côté de la frontière des citoyens turcs venus demander l’asile? C’est une question qui inquiète les défenseurs des droits humains en Grèce, comme la Ligue grecque des droits de l’homme ou le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

Cherchant à savoir ce qu’il est advenu de plusieurs citoyens turcs renvoyés en Turquie, la Ligue grecque des droits de l’homme a décidé de porter l’affaire devant la Cour de cassation grecque. Elle espère ainsi pousser le gouvernement grec à passer par les canaux diplomatiques pour avoir des nouvelles, notamment de Murat Capan, un journaliste turc. Ce dernier était venu demander l’asile en Grèce après avoir été condamné à 22 ans et demi de prison pour appartenance à une organisation terroriste et tentative de renversement du régime. Il aurait été renvoyé en Turquie fin mai où il a été arrêté et mis en prison. Selon Kostis Tsitselikis de la Ligue grecque des droits de l’homme qui enquête sur cette affaire, depuis, même sa famille n’aurait plus de nouvelles.

D’autres cas similaires

Dans deux autres communiqués, la Ligue grecque des droits de l’homme décrit le même procédé. Murat Capan serait passé par le fleuve Evros, à la frontière terrestre entre la Turquie et la Grèce, au nord-est du pays. En compagnie de deux amis, il aurait d’abord été conduit au commissariat. Alors qu’ils voulaient déposer leur demande d’asile, on leur aurait fait croire qu’ils devaient se rendre dans les bureaux du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Mais à la place, des gardes armés et masqués les auraient conduits au fleuve où on les aurait menottés et ramenés en bateau sur le sol turc. Dix jours plus tard, un groupe de neuf personnes, dont un certain Mustafa Can, sa femme et leurs quatre enfants auraient subi, le même sort. Ils se seraient eux aussi adressés à la Ligue grecque des droits de l’homme pour dénoncer cette pratique.

Des retours à la frontière, « pushbacks » qui n’ont rien de nouveau

Bien que ces retours à la frontière, aussi appelés « pushbacks » ne soient pas un phénomène récent, ils avaient pour habitude de concerner les Syriens, les Afghans ou encore les Irakiens. La différence, explique Kostis Tsitselikis, c’est qu’ils n’avaient jusqu’ici pas entendu parler de cas de Turcs. Le président en Grèce du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a rappelé dans un communiqué que c’est une pratique illégale. Pour Philippe Leclerc si ces retours forcés sont « confirmés, c’est extrêmement préoccupant. Le droit de demander et d’obtenir l’asile est un droit fondamental ». Il a appelé les autorités grecques à enquêter, ce qu’elles ont déclaré vouloir faire.

Une autre affaire entache déjà les relations entre la Grèce et la Turquie

En juillet de l’année dernière, huit militaires turcs avaient fui en Grèce la nuit du coup d’État manqué contre Recep Tayyip Erdogan, le président turc. Il a demandé leur extradition, car il les accuse d’avoir participé au coup, mais la justice grecque l’a refusée à deux reprises, car elle estime que les risques de mauvais traitements sont trop importants. Selon la presse grecque, entre juillet de l’année dernière et mars, plus de 200 citoyens turcs auraient demandé l’asile en Grèce.

Partager :