L'économiste camerounaise Vera Songwe devient la première femme à se hisser à la tête de la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique, la CEA, dont le siège est à Addis Abeba. Elle succède ainsi au Bissau-Guinéen Carlos Lopes, qui affirme avoir quitté l'institution au nom de sa liberté de parole. Cela dit Vera Songwe est loin d'être une adepte de l'autocensure.
De l'avis des partenaires sénégalais qui ont eu comme interlocutrice l'ex-directrice du bureau régional pour l'Afrique de l'Ouest et Centrale de la Société Financière internationale, Vera Songwe est elle aussi connue pour ne pas faire usage de la langue de bois. Il n'y aura donc pas de changement de style, mais des centres d'intérêt différents. Ce fut l'industrialisation et l'intégration pour Carlos Lopes qui, de l'avis de tous, a sorti la CEA de sa torpeur. Évoquant ses années passées à la tête de l'institution, l'ancien directeur n'hésite pas à dire qu'il a secoué le cocotier. Pour Vera Songwe, la priorité sera accordée aux financements innovants, à l'agriculture, à l'énergie et à la gouvernance économique. Cela dit, la rigueur, la jeunesse et la promotion du genre - notion chère aux Nations unies - ont milité en faveur du choix de cette brillante économiste qui a passé 20 ans au sein de la Banque mondiale. En 2013 le magazine Forbes Afrique la citait parmi les femmes les plus influentes du continent. Ses nouvelles fonctions, qui l'amèneront à conseiller les gouvernements africains sur leurs politiques de développement, la conforteront inévitablement dans ce rôle.
Vera Songwe et la Sud-Africaine Phumzile Mlambo Ngcuka, ancienne vice-présidente aujourd'hui à la tête d'ONU Femmes, sont les deux Africaines à diriger des entités au sein du système des Nations unies.
Place ensuite à l'exposition « Art Afrique le nouvel atelier ». Ouverte depuis le 26 avril 2017 et visible jusqu'au 28 août à la fondation Louis Vuitton à Paris, elle réunit une sélection d'œuvres des meilleurs artistes de la création contemporaine africaine.
Depuis « Les Magiciens de la Terre », la première grande exposition sur l'art contemporain africain qui s'était tenue du 18 mai au 14 août 1989 au Centre Georges Pompidou et à la Grande Halle de la Villette, on n'avait pas vu d'exposition aussi stupéfiante d'inventivité. Deux collections : la première « Les Initiés » regroupe les œuvres de l'ivoirien Frédéric Bruly Bouabré, inventeur de l'alphabet bété, les masques à partir de bidons recyclés du béninois Romuald Hazoumé, les photos en noir et blanc du Malien Seydou Keïta, les portraits géants et colorés du congolais Chéri Samba et les compositions qui ne manquent pas d'originalité des Camerounais Pascale Marthine Tayou et Barthelemy Togouo - qui réalise par ailleurs une fresque monumentale destinée à la station de métro Château Rouge -, la plus africaine des stations du métropolitain parisien. Toutes ces œuvres présentées à la Fondation Louis Vuitton font partie de la collection de Jean Pigozzi. Constituée à partir de la fin des années 1980, elle fait de lui le plus grand collectionneur d'art contemporain africain. Art qui se classe aujourd'hui au top des ventes dans les galeries les plus prestigieuses à Paris, Londres, Tokyo ou New York. La seconde exposition intitulée « Être là » met en lumière la scène contemporaine sud-africaine révélée au monde depuis la fin de l'apartheid. Je vous recommande le travail de la jeune photographe-portraitiste Zanele Muholi. Il nous plonge dans cette société post-apartheid dans laquelle l'égalité entre blancs et noirs mais aussi entre les sexes était une promesse.
On reste dans le domaine des arts plastiques pour la dernière tête d'affiche. Le photographe français Antoine Schneck consacre un superbe album aux femmes et aux hommes croisés au cours de ses nombreux périples en Afrique. L'ouvrage édité par la galerie parisienne Berthet-Aittouares a pour titre Les beautés singulières.
Singuliers, tous ces visages photographiés au Burkina Faso, au Mali, au Soudan et en Ethiopie le sont assurément à travers l'objectif d'Antoine Schneck. L'artiste a abandonné une prometteuse carrière d'architecte pour se consacrer à la photographie, avec pour principal but de filmer l'Europe centrale et l'Afrique noire. C'est ainsi qu'est née la série « Du masque à l'âme ». Un studio mobile installé à même le sol dans tous les villages qu'il traverse pour une série de clichés. Au final, des visages noirs tous filmés sur fond noir, cela peut paraître curieux mais c'est la marque de fabrique d'Antoine Schneck. Un ton sur ton comme pour mieux fouiller l'âme de celui qui regarde. Vous aimerez sûrement les visages peints à l'argile des Ethiopiens Asera et Nakama, les parures des Burkinabè Ouerra Barry et AwaBande, les turbans des Maliens Sanké Bah et Hamidou Dara ainsi que ceux des Soudanais Mohamed Tahir et Manga Tassinga qui, au fil des pages, cessent d'être des anonymes. Les collectionneurs ne s'y sont pas trompés, Antoine Schneck est un grand maître de la photographie.