Election présidentielle en Serbie: Aleksandar Vučić va tenter de s'imposer au 1er tour

La Serbie vote ce dimanche pour le premier tour d’une élection présidentielle qui risque fort de se transformer en nouveau plébiscite pour l’homme fort du pays, Aleksandar Vučić, actuel Premier ministre, qui a décidé de briguer la présidence. Aleksandar Vučić est-il assuré de remporter son pari ? Eclairages de notre correspondant à Belgrade.

Les sondages annoncent tous l'élection d'Aleksandar Vučić dès le premier tour, mais la fiabilité des sondages demeure aléatoire. La télévision publique et quasiment tous les médias privés ont fait ouvertement campagne pour Aleksandar Vučić : une enquête indépendante a établi qu’il avait bénéficié d’un total de 672 minutes de temps sur les cinq principales télévisions du pays, en sa double qualité de Premier ministre et de candidat, soit 250 minutes de plus que l’ensemble des dix autres candidats réunis.

Aleksandar Vučić est un ancien ultra-nationaliste officiellement devenu « pro-européen » depuis 2008, mais qui n’a pas manqué se rendre lundi dernier à Moscou pour demander la bénédiction de Vladimir Poutine. Son régime évolue dans un sens de plus en plus autoritaire, et l’homme sait qu’il peut compter sur l’appareil très performant de son puissant Parti progressiste serbe mais aussi sur les voix des fonctionnaires et de tous les obligés du régime. La campagne a néanmoins été dure et violente, avec des attaques personnelles contre les candidats d’opposition, le vice-président du parti au pouvoir accusant même que la femme de l’un de ses candidats d’être à la tête de la mafia de la drogue. Des accusations qui ne reposaient pas sur la moindre preuve, mais qui n’ont jamais été officiellement démenties.

Une opposition qui se présente en ordre dispersé.

Deux candidats se dégagent du lot. L’ancien ministre des Affaires étrangères et ancien candidat malheureux à la direction des Nations Unies, Vuk Jeremić, ainsi que l’ancien médiateur de la République, Saša Janković, qui a axé sa campagne sur la défense des droits fondamentaux et des libertés publiques, et qui a réussi à mobiliser la société civile. Saša Janković aura néanmoins beaucoup de mal à élargir sa base au-delà des milieux urbains et éduqués. Les deux hommes sont chacun crédités d’environ 10% des intentions de vote et ambitionnent d’imposer un second tour à Aleksandar Vučić…

Un quatrième homme pourrait venir troubler encore plus le jeu !

Et oui, il s’agit d’un étudiant en communication de 25 ans, Luka Maksimović, qui se présente sous le « nom de scène » de Ljubiša Preletačević Beli - une traduction libre pourrait être « Bienaimé Retourneur de veste Le Blanc ». Et c’est en effet tout de blanc vêtu qu’il mène une campagne parodique, ridiculisant les propos et les promesses de l’ensemble des politiciens. « Mon succès est une claque pour la classe politique serbe, pour le pouvoir comme pour l’opposition. Ils n’ont rien fait pour ce pays, ils n’ont pensé qu’à s’enrichir et les gens préfèrent voter pour le personnage fictif que j’ai créé », explique le candidat qui n’hésite pas à se présenter comme le porte-parole d’une génération née durant les années de guerre et d’embargo, et qui ne se voit pas d’autre perspective d’avenir que l’exil à l’étranger. Selon les sondages, lui aussi pourrait obtenir près de 10% des voix, voire arriver en seconde position et peut-être donc participer à un hypothétique second tour, ce qui achèverait de discréditer et de marginaliser l’opposition « sérieuse », au point que certains se demandent si cette candidature parodique n’est pas favorisée en sous-main par le pouvoir.

Partager :