C’est un réconfort pour les 9 000 employés des sites français d'Alstom, car les dernières semaines ont été éprouvantes. En juillet, faute de commande en vue, les intérimaires n'ont pas été renouvelés à l'usine de Reichshoffen, dans l'est de la France. Ensuite, un contrat de 44 locomotives qui auraient pu être construites dans les ateliers français est passé sous le nez d'Alstom au profit d'un concurrent allemand.
Même l'annonce du méga contrat aux États-Unis, la livraison de 28 TGV, une première sur le sol américain, n'a pas redonné le moral aux salariés français d'Alstom parce que ces trains ne seront pas fabriqués en France, mais aux États-Unis; 20 % du chiffre d'affaires d'Alstom est encore réalisé en France, mais l'avenir du constructeur ferroviaire se situe clairement dans le reste du monde. Tout comme les grandes marques françaises de l'automobile, Alstom trouve aujourd'hui son salut à l'international.
À l'étranger, le carnet de commandes d’Alstom est bien rempli
Il représente l'équivalent de quatre ans d'activité. Ce qui est une belle performance sur un marché de plus en plus concurrentiel. Avec notamment l'arrivée des Chinois qui proposent des trains bon marché. Pour se différencier, Alstom s'est spécialisé dans la maintenance et la signalétique et offre un service global, ce que ne savent faire que 3 ou 4 groupes mondiaux.
Alstom pourrait aussi racheter un concurrent pour renforcer ses positions. Elle en a les moyens : la cession du pôle énergie à General Electric lui a permis d'effacer ses dettes et de mettre de côté un trésor de guerre de plusieurs milliards d'euros. Mais dans l'immédiat, l'entreprise est surtout préoccupée par le sort des sites français où sont employés le tiers de ses effectifs et où le carnet de commandes est quasiment vide.
Le marché français du chemin de fer est saturé ?
On ne renouvelle pas les trains tous les ans, mais plutôt tous les trente ans. L'essor du chemin de fer français souffre aussi de l'endettement des opérateurs. La SNCF a une dette astronomique qui la rend très prudente dans ses investissements.
Les autres financeurs, les États et les régions, sont également très endettés. Ils ont moins d'argent à mettre dans les projets d'infrastructure qui n'apparaissent pas indispensables. Les seuls projets d'envergure français concernent le transport urbain, avec le Grand Paris Express et les RER nouvelle génération.
Ce TGV du futur change-t-il la donne ?
Pour le moment il s'agit de conception et non de fabrication, cela représente un chiffre d'affaires de 50 millions d'euros, un montant modeste comparé aux contrats annoncés par Alstom cet été : 200 millions au Pérou pour la livraison de rames du métro, 800 millions aux Pays-Bas pour des trains intercités et 1,8 milliard d'euros aux États-Unis pour renouveler les trains reliant Boston à Washington.
Le patron d'Alstom Henri Poupart-Lafarge affirme que les usines françaises constituent toujours « la vitrine, le coeur technologique de l'entreprise ». Ce contrat va donc leur apporter de l'oxygène et de l'éclat. Il leur faudra faire preuve de beaucoup d'inventivité pour donner une nouvelle vie au TGV, car son âge d'or semble maintenant terminé.
Les innovations technologiques, une plus grande vitesse, une plus grande capacité d'accueil, entraînent une telle hausse des coûts que la SNCF y renonce, car elle sait qu'elle ne pourra pas répercuter ses coûts sur le prix final. Elle doit déjà endiguer la baisse du trafic sur le TGV comme sur les trains régionaux.