Le navire indien Distya Ameya a pris le risque de charger plus d'un demi-million de barils de pétrole à Marsa al Hariga, le port de Tobrouk, dans l'est de la Libye. Le tanker a pris le large lundi soir contre l'avis de la NOC, c'est la compagnie pétrolière nationale historique, rangée du bon côté désormais, celui du tout nouveau gouvernement d'union nationale à Tripoli.
Un gouvernement parrainé par l'ONU et par les puissances occidentales, mais encore très fragile puisque l'est libyen ne s'y est pas encore rallié : la région de Tobrouk reste sous le contrôle d'un gouvernement laïc rival, proche du général Haftar. Ce gouvernement autrefois légitimé par la communauté internationale mais aujourd'hui dissident, continue de se battre contre les jihadistes de l'EI mais il est très endetté, d'où probablement sa tentative d'exporter en solo du pétrole depuis sa tête de pont, Tobrouk.
La cargaison du Distya Ameya pourrait se monnayer près de 30 millions de dollars. Elle avait trouvé preneur auprès d'une société émiratie, SA Consultancy, qui affiche bizarrement des compétences dans le recrutement plutôt que dans le négoce de pétrole... Mais la première destination en Méditerranée, l'île de Malte, a refusé au bateau d'accoster. Le tanker indien s'est alors ancré dans les eaux internationales, très au large de la Libye, à quelques kilomètres des côtes maltaises – il était encore visible sur les cartes en ligne d’AIS Vessel Tracking mercredi soir.
Fermer les yeux sur ces exportations parallèles mettrait en danger les revenus du nouveau gouvernement d'union nationale libyenne, semblaient signifier les officiels américains et britanniques. De son côté, le chef de la mission d'appui des Nations unies rappelait mercredi que les exportations parallèles étaient contraires à la résolution du 31 mars sur la Libye.
En 2014, une tentative semblable d'exporter du pétrole en dehors de la compagnie nationale libyenne s'était soldée par l'intervention des forces spéciales américaines : elles avaient arraisonné le bateau parti à l'époque de la région de Syrte, alors que le tanker se rapprochait d'une autre île méditerranéenne, Chypre.