Souvent accusées de contribuer au réchauffement climatique sans état d'âme, les entreprises ont démontré pendant cette Business Climate Week qu'elles sont au contraire déjà entrées dans une nouvelle ère, celle de la chasse aux émissions de carbone. Le patron de la société tchèque CEZ qui exploite des centrales au charbon promet d'éliminer totalement ses émissions d'ici 2050. Le Crédit agricole a annoncé de son côté qu'il refuse dorénavant d'octroyer des crédits pour des investissements dans le charbon.
L'Arabie Saoudite voit même l'avenir en vert en imaginant exporter d'ici 2040 de l'électricité solaire plutôt que des barils de brut. Une perspective qui laisse les experts pétroliers dubitatifs, mais qui démontre au moins la prise de conscience, y compris dans les secteurs a priori condamnés par la transition énergétique. La chimie, une industrie très polluante, joue aujourd'hui un rôle pivot dans cette mutation. En fabriquant les polymères indispensables à l'éolien ou au solaire, a souligné le patron de la société allemande Wacker.
Ces entrepreneurs soudainement mués en militants du climat demandent tous la fixation d'un prix du carbone
Effectivement ils sont unanimes. Certains demandent même qu'ils soient élevés. Ensuite les vues divergent sur le meilleur système pour y parvenir. Certains défendent le marché des droits carbones, d'autres préfèrent une taxe. Pourquoi pas plaide le dirigeant américain du groupe solaire Sunpower verser la recette à la Banque mondiale pour financer les investissements dans les technologies vertes? Un impôt à la pompe pour sensibiliser le grand public propose le président de Glencore. Tous d'accord sur la nécessité de tarifier les émissions de CO2, ils ont néanmoins du mal à faire confiance aux mécanismes qu'ils appellent de leurs voeux.
Les gouvernants auront-ils le courage de mettre en place un nouvel impôt, comment utiliseront-ils le produit ? Quant aux marchés, ils sont rivés sur le court terme, or les dépenses nécessaires pour décarboner l'économie sont immenses, on parle de 1000 milliards de dollars par an, il faut donc une vision à très long terme pour engager les entreprises sans remettre en cause leur rentabilité, c'est pourquoi ils sont demandeurs d'une alliance avec les gouvernements pour suivre de près les décisions qui seront prises pendant la conférence climat.
Dans cette grand-messe pro-climat, le président de Glencore, le géant suisse des matières premières est venu jouer les trouble-fêtes
Glencore est entre autres le premier exportateur mondial de charbon thermique, Tony Haywart a donc défendu son activité, en s'appuyant sur l'exemple de l'Inde. Passer du charbon au gaz comme le suggère le patron du groupe pétrolier norvégien Statoil, triplerait le coût de l'énergie lui a confié un membre du gouvernement indien. Suivre le conseil du norvégien est donc impensable pour un pays en développement qui regorge de charbon. Et Tony Haywart d'enfoncer le clou: les énergies fossiles sont et demeurent indispensables pour l'industrialisation.
Gérard Mestrallet, le patron de Engie est sur la même ligne : l'ex GDF Suez investit en Europe exclusivement dans le renouvelable et continue à construire des centrales conventionnelles dans les pays émergents. Les Asiatiques comme les Américains ont été rares à faire le déplacement pour cette Business Climate week. On verra dans six mois à la conférence climat si le verdissement de l'entreprise et des États est vraiment universel. Pour le moment, seuls 37 États ont pris des engagements concrets.