Moscou n'a plus la main dans son bras de fer gazier avec l'Ukraine. La réunion de ce lundi 2 mars 2015 doit permettre de proroger l'accord entre le géant russe Gazprom et son client ukrainien, qui arrive à échéance à la fin du mois. D'où la dramatisation des derniers jours autour des livraisons de gaz russe aux séparatistes du Donbass, la compagnie ukrainienne refusant de le payer à Gazprom. Difficile il est vrai pour Kiev de contrôler désormais les compteurs dans cette région.
Mais dès jeudi 26 février, Gazprom faisait baisser la pression en acceptant d'isoler ces livraisons de gaz du reste des discussions sur le prochain contrat, c'est-à-dire en acceptant de livrer gratuitement les séparatistes. Une concession révélatrice du nouveau rapport de force gazier. Moscou n'est plus en position dominante. Nous sommes à la sortie de l'hiver, qui a été très doux, l'Ukraine a moins consommé que prévu, sa dépendance au gaz russe est aussi beaucoup moins grande depuis que le reste de l'Europe lui renvoie du gaz, par des flux inverses ouest-est. Du coup l'Union européenne, qui consomme elle aussi moins de gaz qu'autrefois, ne craint plus autant que Moscou ferme le robinet du gaz à l'Ukraine - d'ailleurs, la dernière interruption a duré de juin à octobre sans conséquence majeure pour la sécurité gazière européenne, assurée de plus en plus par d'autres fournisseurs.
C'est la Commission européenne qui dispose d'une bombe à retardement contre Gazprom et elle ne devrait pas tarder à exploser : après deux ans d'enquête, le géant russe du gaz pourrait être contraint de payer une amende colossale pour avoir abusé de sa situation de monopole dans les pays baltes et d'Europe centrale, forcés d'accepter des prix du gaz beaucoup plus élevés que les autres pays membres de l'Union. Cette carte, Bruxelles pourrait s’en servir pour imposer à Gazprom d’autoriser la revente de son gaz à des pays tiers, et notamment l'Ukraine, ce qui est tout à fait légal aux yeux de la réglementation européenne, mais que Gazprom a toujours interdit.