Imaginons qu’en France le prix du pain double en quelques jours. Ou qu’au Sénégal, il se passe la même chose pour le prix du riz. Et bien l’équivalent s’est produit dans certaines régions de Russie pour le sarrasin, le sarrasin qui est la base de la nourriture en Russie.
Le sarrasin, on le consomme à tout moment : en journée, accompagné de viande ou de légumes ; et surtout le matin, en kasha, autrement dit en bouillie sucrée ou salée, nature ou aromatisée. Il existe autant de recettes de kasha que de familles russes. Aucune famille ne peut donc se passer de gretchka (sarrasin en russe).
Mais une rumeur a enflé fin octobre, début novembre : la récolte de sarrasin allait être insuffisante à satisfaire les besoins de la Russie. Aucun lien avec les sanctions, non. Mais la principale région productrice, l’Altaï, situé au sud de la Sibérie, non loin de la Mongolie, a subi une sécheresse durant l’été et des neiges précoces. Il n’en fallait pas plus pour que la récolte soit inférieure à l’habitude : autour de 600 000 tonnes au lieu de 700 à 800 000 tonnes. Et encore tout cela n’est pas sûr. D’après les derniers chiffres de l’office spécialisé, ProZerno, la récolte devrait atteindre les 700 000 tonnes. En tout cas, c’est suffisant pour satisfaire la demande annuelle de 550 000 tonnes.
Mais la rumeur a créé la panique chez les consommateurs, qui se sont mis à acheter et stocker frénétiquement du sarrasin. D’après un récent sondage, près d’un tiers des Russes reconnaissent qu’ils ont fait des stocks. Dans certaines régions de Sibérie, la pénurie ainsi créée a provoqué un doublement du prix de la céréale. En moyenne, au mois de novembre, d’après les statistiques officielles, le prix du sarrasin vendu aux consommateurs a augmenté de 54 % !
Le service fédéral anti-monopole a lancé une enquête pour voir s’il n’y avait pas eu de spéculation sur le sarrasin. Mais apparemment, ce n’est pas le cas. C’est la seule demande excessive des consommateurs qui a suffi à créer « la crise de la kacha ». Cette hystérie est due au souvenir des pénuries de l’époque soviétique, mais elle témoigne aussi des craintes liées à une crise économique qui commence à se faire sentir.
D’autres aliments de base, comme le chou ou la pomme de terre, connaissent une augmentation importante. Alors en cette période de fêtes, le gouvernement russe n’exclut pas de prendre des mesures pour prévenir une flambée des prix des produits alimentaires.