Quand la chute des cours du pétrole finit par faire grimper les prix mondiaux du blé ! En Russie, le déclin des revenus pétroliers a fait plonger la monnaie russe, le rouble, et l'inflation menace. Pour contenir le prix du pain, les autorités de Moscou ont décidé de maintenir le plus possible de blé russe dans le pays, aux dépens des exportations.
D'abord en relevant le prix public d'achat du blé auprès des fermiers russes, pour reconstituer les réserves nationales. Ensuite, par tout un tas de tracasseries pour les exportateurs : il est très difficile depuis quelques jours pour les vendeurs et les acheteurs de blé russe d'obtenir les certificats d'inspection sanitaires de leurs cargaisons. Les trains de marchandises acheminant le blé vers les ports seraient aussi très ralentis.
Moscou ne peut pas officiellement décréter d'embargo sur ses exportations de blé, comme ce fut le cas en 2010 : la Russie fait désormais partie de l'Organisation mondiale du commerce. Mais selon l'association russe des exportateurs de produits agricoles, le quatrième exportateur mondial de blé ne garantirait plus ses livraisons qu'à l'Egypte, la Turquie, l'Inde et l'Arménie. Par ailleurs, les fermiers russes ont intérêt à faire de la rétention de leurs derniers quintaux de blé, une valeur plus sûre que les roubles qu'ils pourraient en tirer et qui se dévaluent jour après jour.
L'idée d'un amoindrissement de l'offre disponible pour le commerce international rend fébriles les bourses des céréales. Alors que les cours s'étaient tassés sous l'abondance planétaire des récoltes, ils sont repartis à la hausse en décembre. A Paris, le blé dépasse allègrement les 200 euros la tonne ; à Chicago, les cours ont grimpé de 16 % sur six séances. Un affolement des marchés qui pourrait retomber très vite, car la majeure partie des exportations russes ont déjà eu lieu. Si un report de commandes devait s'effectuer, il bénéficierait au blé américain, plutôt qu'au blé européen, pauvre en qualité panifiable cette année.