La prolongation de l'opération Sangaris votée par le Parlement français est à la Une de la presse africaine ce matin. Une presse colorée où l'on retrouve des papillons partout. C'est le cas de Guinée Conakry Infos, qui titre « Sangaris prolongé », avec un beau spécimen de Sangaris Rouge sur la page d'accueil. Pour le portail d'informations en ligne guinéen ce « vote du Parlement français ne constitue guère une surprise ». « Il suffit de se rappeler les propos tenus par certains membres de la mission parlementaire qui s’est récemment rendue à Bangui, pour comprendre qu’une certaine convergence de vue était prévisible entre les différents blocs qui constituent le Parlement français », lit-on.
Le portail d'informations en ligne guinéen rappelle que les députés avaient constaté l’incapacité notoire des services de sécurité centrafricains à faire face aux milices anti-balaka, qui faisaient alors la loi dans la capitale. Guinée Conakry Infos qui déplore au passage le manque d'enthousiasme européen à apporter son soutien à la France en RCA, celui des Nations unies aussi et des Etats-Unis, même si Obama appuie l'initiative de François Hollande.
En tous les cas, « Les adjurations de Catherine de Bangui ont donc eu un écho favorable à Paris », selon l'Observateur Paalga qui rend un hommage à la France. Il y a un petit peu de moquerie tout de même de la part du quotidien burkinabè pour parler de la nouvelle présidente centrafricaine Catherine Samba Panza. Catherine de Bangui, ça fait un peu médiéval, époque des rois à Paris, et de leurs représentants aristocrates en province, qui passaient le plus clair de leur temps à lever l'impôt et, à chasser les papillons.
Bref, pour le quotidien burkinabè qui publie aussi un spécimen de Sangaris en Une, le papillon n'était décidément pas le meilleur choix pour illustrer une opération qui finalement ne sera pas éphémère. Sangaris, c'est parti pour durer. « Dans ce bourbier qu’est devenu la Centrafrique du fait de la confessionnalisation du conflit, lit-on. La France pouvait-elle replier armes, bagages et soldats sans courir le risque de se voir instruire un procès pour non-assistance à un peuple en danger ? » se demande le quotidien burkinabè.
Qui y répond une fois de plus, par un : « que nenni », teinté de connotation légèrement servile
«Quelles que soient les raisons de ce bonus accordé à Sangaris, la France, elle, au moins, nous témoigne son amitié en toutes circonstances : hier, au Mali, aujourd’hui en Centrafrique, et bien avant ces deux pays, en Libye, elle n’a pas hésité à acheter nos bagarres, comme on dit chez nous. Contrairement à bien d’autres puissances, friandes de nos ressources mais insensibles à nos malheurs. »
Le quotidien L'observateur Paalga, qui termine par une petite note poétique : « Bon vent au papillon qui vient d'avoir les coudées franches pour voler désormais à tire-d’aile ».
A la chasse au papillon.
Les quotidiens africains saluent en grande majorité la décision du Parlement français, à quelques exceptions près. C'est le cas du quotidien camerounais Aurore plus pour qui « La France est responsable de la situation chaotique de la Centrafrique » dans un article intitulé « Impuissance vers un génocide ». Le journal estime que le bilan de la présence militaire n'est pas bon, et illustre cette impuissance militaire en rappelant cette bavure, alors que la présidente Catherine Samba Panza faisait un discours, « un homme a subi la justice populaire jusqu’à ce qu’il passe de vie à trépas, sous le regard des éléments des forces internationales de maintien de la paix que dirige sous cape le commandant de l’opération Sangaris sous le couvert de la Misca », déplore le quotidien camerounais. La mission d'interposition de Sangaris n'est toujours pas perceptible, estime Aurore Plus.
Les « papillon » camerounais.
Les quotidiens camerounais reviennent ce matin sur la libération de Michel Thierry Atangana et Titus Edzoa. Leur destin ressemble un peu au film Papillon, avec Steeve Mac Queen, l'histoire d'un homme jugé à tort et injustement envoyé au bagne. Cameroon Info, rejoue un autre film donc, celui de la libération après 17 ans de prison de ces deux « Papillon » camerounais, avec de nombreux détails, pratiquement heure par heure. Les retrouvailles notamment de l'ancien conseiller du président Biya, Edzoa avec sa famille; lorsqu'il s'est jeté dans les bras de son fils. « Papa, tu es désormais un homme ordinaire », lui a lancé ce dernier. Etre un homme ordinaire, ce n'est pas si simple quand on se lance en politique au Cameroun. Le journal de Yaounde voit dans la chronologie des événements qui a abouti à l'emprisonnement des deux hommes une suite logique. « C'est lorsqu'il a quitté son poste de Ministre et qu'il a décidé de se présenter à la présidentiel, contre Paul Biya, son mentor, que dans la foulée, Titus Edzoa a été arrêté, tout comme son compagnon et directeur de campagne, Michel Thierry Atangana. »
Alors à l’inverse, aucun commentaire dans Aurore Plus, sur cette double libération. Encore moins dans Cameroon Tribune, le quotidien pro-Biya qui vante plutôt en Une, avec un reportage photos, les derniers grands ouvrages présidentiels, les manifestations de rue en faveur du président Biya, les bains de foule de la première dame qui papillonne un peu, toujours très élégante.