Le principal symptôme de cette crise, c'est l'envolée des prix, l'inflation sur un an est à 56%. En fait, c'est un chiffre officiel qui ne tient compte que de l'évolution des prix déclarés. Or, les habitants sont contraints de s'approvisionner au marché noir pour un nombre croissant de produits d'importation à cause des pénuries récurrentes. Un quart des produits de consommation courante manquent aux étalages. Sur le marché parallèle, les prix atteignent des niveaux stratosphériques, cela veut dire que l'inflation réelle est plutôt de l'ordre de 300% d'après les estimations de l'institut Cato, un think tank américain d'inspiration ultra-libérale.
Il n'y a pas que les consommateurs qui souffrent de ces carences. Beaucoup d'usines marchent au ralenti : faute de pièces détachées, l'industrie automobile est quasiment à l'arrêt.
Comment expliquer cette panne gigantesque des importations alors que les pétrodollars alimentent directement les caisses de l'Etat ?
Ce qui pose problème au président Maduro, c'est son propre choix de politique économique, héritée de son prédécesseur Hugo Chavez. Depuis des lustres, la rente pétrolière sert à subventionner l'essence. Un plein au Venezuela coûte à peine le prix d'un bonbon. A court terme, c'est bon pour le porte-monnaie des ménages mais c'est totalement contre-productif sur le long terme. Les aides ont encouragé le gaspillage, le trafic vers les pays voisins et elles coûtent de plus en plus cher à l'Etat.
Faute de raffineries opérationnelles, le Venezuela est même contraint d'importer du carburant pour satisfaire son marché. Pour éviter la fuite des capitaux, le gouvernement pratique par ailleurs un strict contrôle des changes, mais là encore le marché noir a pris le relais pour fournir aux consommateurs les dollars qui manquent tant pour régler la facture des importations.
Pourquoi le président Maduro maintient-il ce contrôle des changes ?
Renoncer au contrôle des changes, c'est voir l'inflation grimper encore plus, c'est-à-dire la population s'appauvrir un peu plus, ce qui est en contradiction totale avec les fondements du chavisme. Pour tenir, le gouvernement se targue de rembourser la dette publique rubis sur l'ongle. Les investisseurs sont preneurs, les obligations du Venezuela offrent les rendements parmi les plus élevés au monde, de l'ordre de 16%. Honorer cette dette, c'est en fait une question de survie, car si le Venezuela faisait défaut, il ne pourrait plus emprunter sur les marchés extérieurs pour financer le développement de l'industrie pétrolière qui lui fournit l'essentiel de ses revenus et de ses devises. Du coup, l'Etat soigne ses créanciers, toujours réglés à temps. Les entreprises du pays, elles, peuvent attendre. L'ardoise interne s'élève à 50 milliards de dollars. Non payées, les entreprises cessent de produire et entretiennent à leur tour l'hydre de l'inflation.