Barrières culturelles, barrières politiques, barrières juridiques... Les handicaps sont nombreux de part et d'autre de l'Atlantique. Sans parler des barrières douanières que cet accord de libre-échange est censé faire disparaître. Mais c'est sans doute le chapitre le plus facile à conclure car les droits de douane sont assez limités entre les Etats-Unis et l'Union européenne. Côté américain, quelques bastions demeurent : le textile, imposé à 35%, les produits agricoles, notons que les fromages sont imposés à 100%. Mais c'est dans d'autres interstices que le protectionnisme américain est le plus efficace. Essentiellement dans les règlements. Savez-vous par exemple que le cabotage est autorisé sur les côtes américaines seulement pour les bateaux construits sur le sol américain ? Autre exemple de protectionnisme, cette fois assumé : le « buy american act ». Il oblige le gouvernement fédéral à privilégier l'achat de produits américains. Voilà le genre de forteresse que les Européens aimeraient voir tomber. En échange, les Américains, eux, aimeraient bien pouvoir vendre aux Européens leur maïs transgénique. Des perspectives irréalistes de ce côté-ci du Vieux continent. C'est dire à quel point la tâche qui incombe aux négociateurs apparaît abyssale.
Ils se retrouvent aujourd'hui à Washington. Quel est l'ordre du jour de cette première session de discussion ?
Pour l'instant, la page est presque blanche. Les négociateurs en chef, Igniacio Garcia Bercero pour l'Union européenne et Dan Mullaney pour les Etats-Unis, vont d'abord vérifier ensemble ce qui entre ou non dans le champ de leurs compétences. L'exception culturelle en est-elle bien exclue comme les Européens l'ont imposée ? Et les services financiers vont-ils figurer dans le mandat américain ? Cette question ne manque pas de sel car elle donne lieu à des solidarités assez inattendues entre Wall Street et Bruxelles. L’Union européenne comme les milieux américains de la finance souhaitent que cette activité soit incluse dans l'accord mais la Maison Blanche y est fermement opposée. L'administration Obama n'a pas confiance dans le régulateur européen. D'après Washingon, le ménage n'est pas terminé dans le bilan des banques européennes. Pas question de voir les établissements américains contaminés par le laisser-aller européen. Une fermeté qui agace au plus haut point les Européens et qui impatiente Wall Street. C'est un sujet au moins aussi sensible aux Etats-Unis que celui de l'industrie culturelle pour les Européens.
Qui a le plus à gagner de cet accord de libre-échange ?
A priori les Européens puisqu'ils espèrent ainsi améliorer leur balance commerciale, déjà excédentaire, avec les Etats-Unis, et surtout gagner un demi point de croissance. Mais ils apparaissent aujourd'hui trop divisés pour entamer sereinement les discussions. Sur les récentes révélations sur l'espionnage des Européens par leurs alliés américains comme sur l'exception culturelle, les différences d'approches ont été étalées au grand jour. Par ailleurs, le mandat européen a déjà fuité dans la presse tandis que la feuille de route américaine reste inconnue. Le cCngrès donnera son avis lors d'un vote sans doute avant la fin de l'année, on y verra alors plus clair sur les intentions des uns et des autres.