C’est une guerre psychologique que les Chinois, maîtres dans ce domaine, ont entamé. Ils appliquent les principes de Sun Zi, le fameux général chinois qui a écrit le premier traité de stratégie militaire. Ils jouent donc avec les nerfs de leurs partenaires européens. L'enquête sur les vins européens est une riposte très graduée.
Elle pénalise surtout les producteurs français. Puisque 60% des vins européens exportés en Chine sont... français. Or Paris est l'un des principaux partisans des sanctions contre les panneaux chinois. En revanche Berlin s'y oppose fermement.
Le commerce avec la Chine vaut bien quelques sacrifices estime l'Allemagne. Normal, les exportations de la Chine vers l'Allemagne ont dépassé celles de la France depuis belle lurette. et surtout l'Allemagne est le premier pays européen où les Chinois viennent faire leur course. Il faut donc savoir choisir ses amis. Le décalage entre Paris et Berlin sur le sujet est flagrant.
La France condamne les représailles chinoises et demande une réunion des 27 pour harmoniser les positions tandis que le ministre allemand de l'économie, le libéral Philip Rösler trouve que la commission a fait une grave erreur en taxant provisoirement les importations de panneaux solaires.
Pékin joue la carte de la division entre Paris et Berlin
D'après Pierre Sabatier, un bon connaisseur de la Chine du cabinet Primeview, Pékin n'aurait sans doute même pas réagi s'il n'y avait pas une différence de vue sensible sur le sujet entre l'Allemagne et la France. Le vrai problème aujourd'hui, enchaine t'il, c'est l'Allemagne. Une Allemagne qui fait passer ses intérêts de grand pays exportateurs avant ceux de ces alliés naturels. Les trois quarts des exportations allemandes sont encore destinées à l'Europe, mais Berlin a bien compris que le marché de demain est en Asie.
Ce sont les nouveaux riches chinois qui peuvent se payer les voitures de luxe made in Germany, et pas les chômeurs grecs ou espagnols. Et les exportations, c'est la fuite en avant de la croissance allemande, dans un pays vieillissant, le salut ne peut pas venir de la consommation mais bien de la seule demande externe.
Sous la pression de l'Allemagne, l'Europe pourrait perdre ce bras de fer avec la Chine ?
La taxe de 11% sur les panneaux chinois mise en place par la commission est provisoire. C'est seulement en décembre qu'elle sera confirmée, voire amplifiée, ou bien oubliée. Entre temps les élections auront eu lieu outre rhin et la chancelière ou son successeur deviendra, peut-on espérer plus européenne qu'allemande.
L'Union européenne en a besoin. Si elle échoue à imposer ses vues à la Chine en matière de solaire, ce sera un coup dur pour l'industrie, mais surtout une défaite en rase campagne en terme de commerce international. Un aveu de faiblesse face à la Chine, mais aussi face aux Etats-Unis.