L’optimisation fiscale dans le collimateur du fisc

Cette semaine les sénateurs américains ont demandé des explications au patron d'Apple, une société bien connue pour sa créativité fiscale. Tandis que de leur côté les Européens ont essayé de se mettre d'accord sur la lutte contre la fraude fiscale. Fraude qui concerne surtout les entreprises transnationales, car pour ces contribuables, l'évasion fiscale est un jeu d'enfant.

Leur taux d'imposition n'est que de 3 à 4% alors que le taux moyen des entreprises est de 23% dans les pays de l'OCDE. Si les multinationales pratiquent l'optimisation fiscale à si grande échelle, c'est d'abord parce qu'elles ont les moyens financiers de s'offrir l'armée de fiscalistes capables de trouver les meilleures combines. Et surtout parce qu'elles profitent des failles d'un droit fiscal totalement obsolète pour saisir dans sa complexité les richesses créées par ces nouvelles entités.

Le droit fiscal des entreprises a été conçu à l'ère industrielle pour taxer des entreprises avec une forte présence sur le territoire national, à travers leur siège, leur personnel et leur clientèle domestique ou étrangère. Un schéma qui ne correspond plus à celui de l'ère numérique.

Avec les Apple ou Google, on bascule dans un univers en apesanteur

D'abord ces multinationales fabriquent de l'immatériel, dans l'iPhone, c'est la conception qui vaut le plus et non l'objet en soit, difficile donc d'apprécier et de taxer cette valeur abstraite. Ensuite, ces nouvelles entreprises sont peu ancrées dans leur pays d'origine, car elles ont bien souvent plus de clients à l'étranger. En sous-traitant la fabrication des produits, comme Apple le fait avec la société taiwanaise Foxconn, une bonne partie du personnel impliqué dans la production n'apparait pas dans sa comptabilité.

Il faudrait donc réviser l'ensemble des dispositions fiscales pour mieux les cerner, c'est la demande assez surprenante faite par le patron de Google, Eric Schmidt. Mais les Etats n'en sont encore pas là. Le G20 souhaite d'abord lutter contre la fraude fiscale. L'Europe des 27 suggère de contraindre ces multinationales à publier leur impôt pays par pays.

Cette proposition faite hier par Michel Barnier va dans le bon sens. Sous la pression médiatique, les entreprises prises en flagrant délit d'optimisation fiscale reviendront peut-être à des pratiques plus saines. Mais il faut reconnaitre que les entreprises aujourd'hui sur le banc des accusés n'ont fait que tirer parti de la guerre que se livrent les Etats à coup d'avantages fiscaux pour attirer sur leur territoire des entreprises, ou au moins leur capital.

Londres vient par exemple d'accueillir l'italien Fiat à bras ouvert comme résident fiscal. Les torts sont partagés, et les intérêts aussi. Les Etats veulent mieux collecter l'impôt et les multinationales ont tout intérêt à rester en bon termes aver leur pays d'origine pour bénéficier de sa protection. Car c'est au nom du droit occidental, que les Américains comme les Européens défendent la propriété intellectuelle, une notion qui est au coeur de l'économie numérique. Apple l'a visiblement bien compris: ses appareils sont assemblés en Chine, mais c'est en Californie que la marque à la pomme construit actuellement son siège social, là où l'environnement législatif protège le mieux son activité.

Partager :