François Hollande veut une politique européenne de change

A Strasbourg, le président François Hollande s'est prononcé, devant le Parlement européen, en faveur d'une politique européenne de change pour lutter contre l'euro trop fort. Le président français rentrerait-il à son tour dans la guerre des monnaies ?

Le ton employé par le président français était tout sauf belliqueux. Au lieu de stigmatiser le Japon ou les Etats-Unis, deux pays accusés ces derniers temps de laisser filer leur devise et donc de nourrir cette guerre des monnaies, il a souligné, au contraire, qu'ils soutiennent ainsi leur croissance. C'est surtout un beau pavé dans le marigot européen que François Hollande a jeté en affirmant devant les parlementaires européens : « Nous devons avoir une politique de change ».

Car c'est un sujet tabou au sein de la zone euro. Ce n'est pas dans le mandat de la BCE. L'euro trop fort serait une préoccupation purement ... franco-française. Le ministre allemand de l'Industrie a d'ailleurs répondu indirectement à la proposition de François Hollande à Paris, lors d'une rencontre avec son homologue Arnaud Montebourg. Pour ce libéral pur jus, il est préférable de renforcer la compétitivité de l'Europe plutôt que de chercher à en affaiblir la monnaie. Pour les gardiens du temple de l'euro, pas question de toucher aux taux de change.

 
Pas question de toucher à l’euro trop fort, même s’il pénalise les économies européennes

C'est en gros la vision de l'Allemagne, qui souffre moins que d'autres du surenchérissement de l'euro, en partie parce que sa force à l'export n'est pas seulement basée sur les prix mais aussi sur la qualité de ses produits. Pour d'autres, un euro fort est parfois un vrai problème. Quand François Hollande évoque « les efforts de compétitivité annihilés par la valorisation de l'euro », c'est exactement ce qui est en train de se passer pour l'Espagne.

En France, ceux qui se plaignent le plus volontiers de l'euro trop fort ne sont pas ceux qui ferment des usines mais les patrons successifs d'une entreprise en pleine forme, qui embauche et qui vit de ses exportations. Je veux parler d'Airbus. Fabrice Brégier aujourd'hui, Louis Gallois hier, répètent à qui veut l'entendre que l'euro trop fort est un handicap constant face à un concurrent, Boeing, favorisé lui par la faiblesse du billet vert. 10 centimes de hausse de l'euro, c'est un milliard d'euros de perdus pour Airbus. En gros, quand l'euro vaut plus d'1,3 dollar, il handicape plus qu'il n'avantage la zone euro. Or, l'euro flirte aujourd'hui avec les 1,35 dollar.

La zone euro peut-elle se doter d’une politique des taux de change ?

Le président français a indiqué qu'une politique des taux de change ne dépendait pas que de la BCE. Il faudrait qu'il précise sa pensée, car c'est pourtant la Banque centrale la mieux placée pour intervenir sur la monnaie comme on l'a vu au plus fort de la crise de la dette. L'Europe a-t-elle donc vraiment les moyens de se doter d'une telle politique ?

Maintenant, il existe d'autres instances pour discuter des taux de change, le G20 par exemple. Mais le principal écueil est de parvenir à un accord entre des pays aux intérêts économiques divergents. Si, déjà, le sujet fait débat au sein de la zone euro, comment envisager une solution acceptée par 20 pays ?
 

 

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