C'est un beau raccourci que l'ONG utilise pour insister sur un fait incontestable et quasiment universel : très discrètement mais sûrement les riches sont devenus au cours des vingt dernières années de plus en plus riches. Le revenu des 1% les mieux lotis a augmenté de 60%. Sans que la pauvreté recule dans les mêmes proportions pendant cette période. Cela donne des situations d'inégalités record. Y compris dans des pays dits émergents. En Chine, par exemple, où jamais les écarts n'ont été aussi criants : les 10% les plus nantis captent 60% du revenu national. Une situation comparable à celle de l'Afrique du Sud, où le non partage des richesses est revenu au même niveau qu'à l'époque de l'apartheid. Et cette ultra richesse est contre productive : à partir d'un certain niveau de revenu, elle n'est plus réinvestie en consommation. D'où la proposition d'Oxfam : éradiquer l'extrême richesse d'ici 2025 ; cela rappelle les OMD, les Objectifs du Millénaire pour le développement, quand les Nations unies en 2000 se sont données pour ambition de réduire la pauvreté d'ici 2015.
Faut-il augmenter les impôts ?
Il faut surtout mieux collecter l’impôt. Plus facile à dire qu’à faire tant les stratégies de contournement des individus ou des entreprise se sont raffinées. Oxfam propose d'éliminer les paradis fiscaux qui accueillent le tiers de la richesse mondiale. C'est un bon début mais insuffisant car il y a aussi les pays au régime fiscal séduisant. La Suisse, bien sûr, mais aussi des niches moins connues, comme celle que procurent les Pays-Bas, au coeur de l'Europe, aux multinationales soucieuses de faire baisser leurs impôts. L'alliance Nissan Renault est ainsi domiciliée aux Pays-Bas.
Existe-t-il des moyens de lutter contre cette concurrence fiscale entre Etats ?
Pas vraiment, mais les Etats y réfléchissent. Avec l'endettement qui les fragilise de plus en plus, ils cherchent à mieux faire rentrer l'impôt. Dans cet esprit, l'OCDE est en train de mettre sur pied une équipe d'inspecteurs sans frontières pour traquer l'évasion fiscale. Ils doivent dans un premier temps aider les pays en développements les plus mal lotis pour traquer la fraude. Il y a aussi des initiatives unilatérales comme celle prise par les Etats-Unis : les banques étrangères qui refusent de coopérer avec l'administration fiscale américaine risquent des amendes. Mais pour l'instant, seulement sept pays ont accepté les conditions américaines. La dénonciation d'Oxfam est dans l'air du temps, mais la route est encore très longue avant que la redistribution des richesses fasse vraiment reculer la pauvreté.