La flotte de navires pétroliers n'a jamais été aussi importante que cette année. De nombreux tankers flambant neufs ont été mis à flot ; seize bateaux supplémentaires rien qu'au mois de septembre. Des livraisons qui viennent parfois avec plusieurs années de retard, en complet décalage avec le contexte de leurs commandes. « Jusqu'en 2007, grâce à l'envolée de la consommation de brut, les armateurs pétroliers ont fait beaucoup beaucoup d'argent, rappelle un courtier en fret maritime. Ils ont acheté trop de bateaux. Entre 2002 et 2007, la flotte a doublé. Elle a encore doublé de 2007 à 2010 ! ».
Aujourd'hui que la demande de pétrole ralentit, les compagnies de transport pétrolier se retrouvent avec des dizaines de tankers inutilisés sur les bras. Contrairement au transport du fer et du charbon, dopé par la demande chinoise, avant le pic automnal de production dans les aciéries, les commandes chinoises de brut ne suffisent pas à compenser la mollesse de la consommation dans les pays occidentaux. Toutes les catégories de navires citernes sont touchées. Plus ces derniers sont gros, plus ils souffrent. Un supertanker de 300 000 tonnes normalement facturé 10 000 à 15 000 dollars par jour ne reçoit plus aujourd'hui que 3 000 dollars, autrement dit six fois moins que ses dépenses quotidiennes de fonctionnement.
Il est plus rentable en ce moment de laisser les navires pétroliers au port le plus longtemps possible, au moins ils ne dépensent pas de carburant. Il faut néanmoins continuer de payer le financement du bateau, son assurance, l'équipage pour son entretien. Plusieurs petites et moyennes entreprises du fret pétrolier, comme Omega Navigation et Marco Polo Seatrade, ont déjà mis la clé sous la porte. D'autres voient leurs bateaux saisis par leurs créditeurs à l'occasion des escales. Un des leaders américains du secteur, General Maritime, semble lui aussi fragilisé car sa note vient d'être dégradée par Moody's.