Organisé tous les deux ans en alternance avec le salon parisien du Bourget, Farnborough s'est ouvert lundi sur une tonalité plutôt optimiste. Oubliée en effet la morosité qui a marqué l'édition 2009 du Bourget, une manifestation plombée par la crise économique mondiale et endeuillée par la catastrophe du vol Air France Rio-Paris. A Farnborough en effet, d'importantes commandes sont attendues par les deux géants Airbus et Boeing mais aussi par les constructeurs d'avions régionaux comme le Brésilien Embraer ou le Canadien Bombardier.
Dès lundi, l’avionneur américain a ouvert le bal des commandes en annonçant un important contrat avec Emirates. La compagnie aérienne de Dubaï a ainsi commandé 30 avions long-courriers 777-300 au constructeur de Seattle pour une valeur de plus de 9 milliards de dollars. Cette commande intervient seulement six semaines après celle effectuée auprès du concurrent Airbus de 32 avions super-géants A380 pour quelque 11 milliards de dollars. En quarante-huit heures, ce sont plus de 50 milliards de dollars de commandes qui ont déjà été engrangés.
Retour en force des loueurs d’avions
C’est indéniablement la reprise du trafic aérien commercial qui est à l’origine de cette embellie du secteur aéronautique, tirée par le dynamisme des marchés asiatique et latino-américain. Pour Bruno Goutard, spécialiste du secteur aéronautique chez Euler-Hermes, « on assiste à un découplage manifeste dans le secteur aérien entre les zones qui présentent des perspectives économiques plus dynamiques –Asie-Pacifique, Amérique latin et Golfe– et celles qui restent en retrait, au premier rang desquelles l’Europe ».
Autre signe qui confirme la reprise du secteur, les loueurs d'avions, qui achètent des appareils pour les louer à des compagnies aériennes, sont de retour en force à Farnborough. Premiers à fuir le marché quand le trafic baisse, ils sont aussi les premiers à revenir quand les perspectives sont de nouveau bien orientées.
A en croire une étude récemment publiée par Boeing, le secteur aéronautique a encore un bel avenir puisque le marché des avions civils neufs représentera d'ici 2029 près de 31 000 nouveaux appareils. Un marché juteux d'une valeur de 3 600 milliards de dollars.
Un marché dominé par un type d'appareils, les moyens-courriers ou monocouloirs, et sur lequel les géants que sont Boeing et Airbus ont de plus en plus de concurrents. Les spécialistes des avions régionaux, comme le Brésilien Embraer ou le Canadien Bombardier, tout comme les nouveaux entrants à l’image du Chinois Comac, cherchent en effet à casser la suprématie des deux rivaux américain et européen qui ont tardé à prendre cette menace au sérieux.
L’aéronautique militaire en berne
Mais si le secteur aéronautique civil semble avoir tourné le dos à la crise, les constructeurs d'avions militaires font plutôt grise mine. La rigueur pèse en effet très lourd sur les budgets des armées et les commandes vont indéniablement s'en ressentir à Farnborough. Pour Jean-Michel Guhl, spécialiste de l'aéronautique militaire, « ce salon ne sera pas un salon de prise de commandes militaires. Les industriels présentent leurs matériels et cela ne va pas plus loin ».
Cette situation concerne au premier chef l’Europe où les gouvernements, crise oblige, ont prévu de réduire les budgets consacrés à la Défense de plusieurs dizaines de milliards de dollars. Ces coupes pourraient remettre en questions de nombreux projets importants. Certains pays envisagent notamment de réduire leurs commandes. L’Allemagne pourrait ainsi abandonner l’acquisition de la dernière tranche de 37 avions Eurofighters, tandis que l’Italie et la France ont déjà décidé de réduire leurs achats de frégates multi-missions Fremm.