Sacré meilleur album de langue française de l'année, La saga de Grimr raconte l'histoire d'un jeune homme rebelle, Grimr, colosse à la tignasse rouge, à la recherche de son identité dans la nature hostile de l'Islande du XVIIIe siècle.
Pour conter cette épopée sauvage, Jérémie Moreau a travaillé à l'aquarelle où le bleu acier le dispute au vert et au brun. Peu de paroles mais un récit puissant grâce à la seule force des images.
Il s'agit du quatrième album de Jérémie Moreau, jeune surdoué de 30 ans, qui dans sa courte carrière a déjà reçu le prix de la BD scolaire en 2005, le prix Jeune talent au festival d'Angoulême et celui de la meilleure BD francophone en 2012 et le prix des libraires de BD en 2013.
Dans la combi de Thomas Pesquet décroche le prix du public
Il avait face à lui neuf autres auteurs dont quatre femmes. Parmi elles, la Française Marion Montaigne a reçu le prix du public pour son album Dans la combi de Thomas Pesquet (Dargaud), qui retrace le parcours de l'astronaute qui a passé près de 200 jours dans la Station spatiale internationale (ISS).
Marion Montaigne, 37 ans, avait déjà reçu ce prix en 2013 pour Tu mourras moins bête, tome2. Le choix du public semble logique au vu du succès phénoménal que rencontre cet album en librairie depuis sa sortie en novembre.
Le jury du festival a attribué son prix spécial à une autre jeune femme, Marion Fayolle, 29 ans, récompensée pour Les amours suspendues (Magnani), un récit intimiste et gracieux de soubresauts amoureux ordinaires. L'Australien Simon Hanselmann a reçu le prix de la série pour le déjanté Megg, Mogg & Owl Happy Fucking Birthday (Misma).
Les fauves vont donc cette année à une nouvelle génération. Une jeunesse primée qui sensibilisait aussi les festivaliers à leur lutte en faveur d’une revalorisation de leurs droits d’auteur. Plus de 300 jeunes dessinateurs et dessinatrices ont déjà signé une pétition pour attirer l’attention du gouvernement, des lecteurs et des éditeurs sur leur précarisation croissante.
Sonny Liew, le Singapourien qui cartonne
Il a 43 ans mais en paraît vingt de moins. Sonny Liew, natif de Malaisie, choisit la bande dessinée pour raconter l’évolution de son pays d’adoption, Singapour. Il le fait avec Charlie Chan Hock Chye, Une vie dessinée, une vraie fausse autobiographie d’un dessinateur prétendument né en 1938.
« Je lisais des livres sur l'histoire de la bande dessinée au Singapour. Et je me suis rendu compte que cette histoire épousait celle de mon pays, né après la décolonisation britannique. J'ai eu l'idée de faire un livre sur l'histoire de Singapour mais qui ait l'air de raconter celle de la BD. Nous n'avons pas d'industrie de la BD, ce n'est pas comme en France ou au Japon. Cela me laissait un vide à investir pour créer cet auteur fictif », confie-t-il à RFI.
Le gouvernement singapourien a refusé de verser une subvention à ce livre jugé subversif. Ce qui lui a encore plus fait de publicité. A Singapour, ce roman graphique très ambitieux au style composite est devenu un best-seller. Il a également décroché de multiples prix, notamment aux Etats-Unis, faisant de Sonny Liew le chef de file de la bande dessinée singapourienne.