Festival de Cannes 2012 : ouverture en Technicolor

Bataille médiatique de tapis rouge en France. Pendant qu’était dévoilé le gouvernement présidé par le socialiste Jean-Marc Ayrault ce mercredi 16 mai 2012, le 65e festival international du film s’ouvrait à Cannes. Une cérémonie d’ouverture qui n’a pas dérogé à la tradition : stars, paillettes et cinéma d'auteur.

Le sauveur du monde sur le tapis rouge : Bruce Willis a attiré les flashes pour la cérémonie d’ouverture. Avec Tilda Swinton, Bill Murray et Harvey Keitel, la star hollywoodienne est en effet à l’affiche du premier film à avoir les honneurs de la compétition : « Moonrise Kingdom », de l’Américain Wes Anderson.

Les vedettes ont gravi les marches du Palais des festivals, sous l'affiche géante de cette 65e édition, la photo de Marilyn Monroe soufflant une bougie. Marilyn Monroe, qui n’était pourtant jamais venue sur la Croisette, est morte il y a exactement 50 ans.

La cérémonie d’ouverture a d’ailleurs rendu hommage à l’actrice blonde platine. La chanteuse Beth Ditto, du groupe Gossip, a interprété sur scène « Candle in the wind », une chanson qu’Elton John lui avait dédiée.

Toute de rouge vêtue, la maîtresse de cérémonie Bérénice Béjo, à l'affiche l'an dernier de « The Artist », a appelé sur scène l'équipe de « Moonrise Kingdom » pour prononcer, ensemble, la phrase rituelle de l’ouverture du 65e festival dans une joyeuse cacophonie.

Amour et chaos

Après cette cérémonie d'ouverture sobre et chic, « Moonrise Kingdom » a entraîné les festivaliers dans un tourbillon de fantaisie.

Wes Anderson, le réalisateur de « La famille Tennenbaum » ou « La vie aquatique », raconte la folle équipée de deux pré-adolescents amoureux, recherchés par leurs parents ou chefs scouts dans une île de la côte est des Etats-Unis dans les années soixante.

Le cinéaste américain, dandy quadragénaire, installe un dispositif très sophistiqué et élaboré : « Quand je fais un film, ce qui m’intéresse, c’est de créer un monde que vous n’avez jamais exploré. Ce n’est pas la réalité, et j’espère que cela ne ressemble à aucun autre film. C’est un lieu unique. Dans mon film, la jeune fille trimballe une valise avec ses livres de science-fiction préférés. Et j’imagine volontiers que mon film pourrait être un de ces livres dans une valise. »

Un film d'auteur donc, même s'il y a des stars au générique, comme Bruce Willis, Bill Murray ou Harvey Keitel.

Cette oeuvre sera sans doute l'une des rares en compétition à faire rire les spectateurs, mis à part peut-être une comédie sociale signée Ken Loach. Mais en même temps, il correspond bien aux thèmes généraux qui unissent les 22 films en lice pour la Palme d'or, ainsi définis par le délégué général Thierry Frémaux :

« Amour et chaos, souffrance et générosité. Le thème éternel de l’amour, du romanesque, de la rencontre entre les êtres, des destins intimes, c’est quelque chose que l’on va retrouver beaucoup. Mais cette sélection c’est aussi des cinéastes qui s’interrogent sur le monde, qui disent que le monde ne va pas bien, mais qui disent aussi qu’en se battant on peut continuer à le changer. Quand Yousri Nasrallah a fait ce film, « Après la bataille », la bataille fait référence à la révolution égyptienne qui a chassé du pouvoir Hosni Moubarak. Qu’est-ce qu’on fait d’un pays comme cela quand la démocratie revient ? C’est une question qu’un cinéaste comme Yousri Nasrallah se pose ».

« Après la bataille », de l'Egyptien Yousri Nasrallah sur la révolution place Tahrir, sera projeté ce jeudi soir à Cannes.

Le jury en conclave

Outre « Moonrise Kingdom » et « Après la bataille », le jury présidé cette année par l’Italien Nanni Moretti va visionner quelque vingt films en lice pour la Palme d’or.

Nanni Moretti, six fois sélectionné sur la Croisette et qui décrocha la Palme d’or en 2001 avec « La chambre du fils », apparaît rigoureux et exigeant. Volontiers provocateur, il avait déclaré avant même la sélection attendre des films qui le surprennent, et qu’il n’aurait pas l’impression d’avoir déjà vu mille fois.

Lors de la cérémonie d’ouverture, sur la scène du Palais des festivals, le cinéaste romain engagé à gauche a remercié dans un français parfait la France, un « pays qui, contrairement à d’autres, réserve toujours un rôle important au cinéma dans la société ».

A ses côtés pour délibérer, huit autres personnalités, le couturier Jean-Paul Gaultier, le comédien Ewan McGregor, les actrices Hiam Abbass, Diane Kruger et Emmanuelle Devos, et les réalisateurs Alexander Payne, Raoul Peck ou Andrea Arnold.

Nanni Moretti a dit mercredi qu'il serait attentif à la démocratie interne. Mais le cinéaste, en lice l'an dernier avec « Habemus Papam », un film sur l'élection du pape, tient au secret des délibérations : « Je ne comprends pas cette nouveauté de la conférence de presse du jury après le palmarès. J’étais membre du jury en 1997, et à l’époque on devait obligatoirement garder le silence sur les délibérations. Les deux derniers tabous étaient le silence à Cannes et le silence du conclave pour l’élection du pape. Maintenant, il ne reste que le conclave. Donc le dimanche du palmarès, on dira des choses très diplomatiques, très banales…Ou peut-être que non. »

La compétition entre dans le vif du sujet dès ce jeudi avec la projection du film français très attendu « De rouille et d’os » de Jacques Audiard et celle du film égyptien « Après la bataille » de Yousri Nasrallah.

Ce jeudi, c’est également l’ouverture des sections parallèles dont RFI est partenaire : la Quinzaine des réalisateurs qui s’ouvre avec un film de Michel Gondry, « The we and the i ». Et pour la Semaine de la critique, coup d’envoi avec « Broken » du Britannique Rufus Norris.

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