RFI : D’où vient votre amour pour l’art africain ?
James Ross : Je collectionne depuis les années 1970. Chaque génération m’avait dit : il est trop tard pour faire une bonne collection. Il n’est jamais trop tard, il devient tout simplement de plus en plus cher ! Ma famille collectionnait déjà beaucoup l’art nord-africain. Quand j’ai voulu voir les collections d’autres gens, on m’avait recommandé de voir un certain collectionneur. Ainsi, j’y suis allé avec ma femme Laura. Il y avait quatre pièces qui m’intéressaient et je voulais faire un choix. Mais finalement j’ai tout pris ! La bouche de ma femme restait littéralement ouverte. C’était le début.
RFI : En quoi consiste votre projet Ross Archive of African Images avec l’université de Yale ?
J.R. : C’est un site internet. Je trouve préoccupant que de moins en moins d’universitaires s’intéressent aux sculptures de l’art tribal africain. De plus en plus se réorientent vers l’art contemporain africain ou l’art contemporain américain, parce que c’est plus simple à étudier : les artistes viennent chez vous, il n’est pas nécessaire de dépenser de l’argent pour aller en Afrique et étudier une littérature sur l’art africain qui est très ancienne et difficile d’accès. Souvent, il n’y a pas de livre, mais seulement un article sur un sujet. Pour cela, j’ai essayé de créer un site internet qui réunit toutes les images anciennes qui existent. Il n’y a pas seulement des photographies, mais aussi des dessins, des peintures etc. Bien sûr, il y a plein de pièces anciennes que je n’ai pas sur mon site. Je m’intéresse uniquement aux pièces anciennes figurant sur une image ancienne qui date de 1920 ou avant. Le plus ancien sur le site est un dessin qui date de 1591. En ce moment la base de données réunit 5 000 images, mais parfois une pièce apparaît sur plusieurs images et il y a des images qui montrent plusieurs pièces à la fois.
RFI : Le site a pour objectif de valoriser l’art africain ou de faciliter la vie des marchands et des collectionneurs ?
J. R. : Des images anciennes qui ont été prises avant l’apparition de beaucoup de contrefaçons sont une information très précieuse pour tous les gens qui s’intéressent à l’authenticité des œuvres. Naturellement, avant 1920 les contrefaçons existaient aussi, mais beaucoup moins qu’aujourd’hui. Ce site fournit des informations importantes par rapport à l’histoire d’une pièce. Cela est très important pour les marchands, les collectionneurs, les scientifiques, les musées et les commissaires d’expositions. Tout le monde y trouve son intérêt.
RFI : Vu des Etats-Unis, Paris est-ce la capitale mondiale de l’art premier ?
J.R. : Absolument. Les pays décisifs sont vraiment la France et la Belgique. Ils étaient aussi les capitales pendant le colonialisme. Les ressources de la Grande-Bretagne se sont asséchées. Et les marchands parisiens sont plus actifs pour se rendre à Bruxelles et faire revenir l’art primitif à Paris que l’inverse. Pour tout cela, Paris est devenu la capitale des arts premiers, aussi grâce à la collection merveilleuse au quai Branly.
Les Américains ont aussi essayé de bien faire. Mais le niveau d’excitation n’est pas le même qu’ici. Il y a quelques années, on a essayé de construire un nouveau musée pour susciter l’enthousiasme des collectionneurs. Cela a seulement marché pendant un certain temps. Il y a une collection merveilleuse au Metropolitan Museum, mais il nous manque la concentration de collectionneurs et marchands comme ici à Paris.
Parcours des mondes, du 7 au 11 septembre à Saint-Germain-des-Prés, Paris.