Les deux principaux candidats sont le président sortant Mehmet Ali Talat et le Premier ministre Dervis Eroglu, qui le devance dans les sondages. Mehmet Ali Talat, 58 ans, est un fervent partisan de la réunification de Chypre. Dervis Eroglu, 71 ans, n’a pas les mêmes ambitions pour l’île. La lenteur des négociations menées par Mehmet Ali Talat a découragé la majeure partie des Chypriotes turcs pourtant favorables à la réunification lors de l’entrée de Chypre dans l’Union européenne en 2004. Les réticences du côté des Chypriotes grecs ont fini par les convaincre qu’une partition de l’île était préférable.
164 072 électeurs sont inscrits pour ce scrutin sur une population de 250 000 habitants. Un deuxième tour aura lieu le 25 avril pour départager les deux candidats arrivés en tête si aucun des deux n’obtient plus de 50% des voix. Les nationalistes ont obtenu, il y a un an, lors des législatives, la majorité au Parlement. S’ils remportent l'élection présidentielle, les négociations pour la réunification de l’île risquent de sombrer pour de bon, assombrissant sérieusement les perspectives d’intégration de la Turquie au sein de l’Union européenne.
Les Turcs pris à leur propre jeu
Chypre est divisée depuis 1974, date à laquelle la Turquie a envahi la partie nord après un coup d'Etat fomenté par des nationalistes chypriotes grecs pour rattacher l’île à la Grèce. La Turquie maintient 35 000 soldats sur l’île. « Le résultat du scrutin affectera aussi le destin de la Turquie », affirme Memeth Ali Talat. L’élection de Dervis Eroglu compliquerait la tâche d’Ankara. Les nationalistes ont fait campagne pour une solution fondée sur deux Etats et deux peuples. Une solution rejetée par les Chypriotes grecs parce qu’elle entérinerait la partition.
La République turque de Chypre du Nord est une entité reconnue seulement par Ankara. Elle a sans aucun doute une influence sur le « président » de Chypre du Nord qui est en charge des pourparlers sur la réunification de l'île mais le discours des nationalistes perturberait ses propres négociations d'intégration à l'Union européenne.
Sans une solution à la division de Chypre, Ankara ne peut envisager sérieusement de faire partie de l'Union européenne dont la République de Chypre, réduite pour l’instant au sud de l’île, est un des pays membres. La Turquie négocie depuis 2005 son entrée dans l'UE. Plusieurs chapitres de ses négociations avec Bruxelles sont d’ores et déjà gelés, car la Turquie refuse de reconnaître la République de Chypre et de lui ouvrir ses ports et ses aéroports.