La future Clio oppose Renault au gouvernement français

Le constructeur français Renault est soumis à la pression du gouvernement pour maintenir la production de sa Clio en France. Nicolas Sarkozy a convoqué en urgence le PDG du groupe, Carlos Ghosn, pour un entretien à l’Elysée samedi prochain 16 janvier.

La pression devient maximale sur les dirigeants du constructeur automobile français. Le 8 janvier dernier, une information du quotidien La Tribune a fait l'effet d'une bombe : Renault envisagerait de délocaliser en Turquie la production de la future Clio IV qui sera lancée en 2013, alors qu'elle était jusqu'à présent montée à l'usine française de Flins, dans la région parisienne. Depuis, le gouvernement essaie de dissuader Renault de réaliser ce projet. Le 13 janvier, le directeur général du groupe, Patrick Pelata, reçu par le ministre de l'Industrie Christian Estrosi, a voulu rassurer : la Clio continuera à être fabriquée en France, et aucune décision n'est prise quant à la future répartition de la production de cette voiture dans le monde.

Le gouvernement hausse le ton, après avoir beaucoup soutenu le secteur automobile, depuis le début de la crise. Renault comme PSA ont bénéficié chacun de 3 milliards d'euros de prêts bonifiés, c'est-à-dire à taux très réduit. L'Etat a financé la prime à la casse, 600 millions d'euros, ce qui a grandement soutenu les ventes en 2009. Renault a aussi reçu 100 millions d'euros pour son projet de voiture électrique, la Zoé, qui devrait être fabriquée à Flins à partir de l'an prochain et 150 millions d'euros pour la fabrication de batteries électriques.
En contrepartie de cet effort financier, le gouvernement avait demandé aux constructeurs qu'ils s'engagent à ne pas fermer d'usine et à ne pas licencier de personnel en France.

« Difficile de conserver le bas de gamme en France »

Renault songe néanmoins à réorganiser sa production pour des raisons de coût. Produire une Clio en France coûte, selon le PDG Carlos Ghosn, 1400 euros de plus qu'en Turquie, où le groupe produit déjà des Clio II et III et possède par ailleurs près de 15% du marché. Le coût horaire de la main d'œuvre en France a en effet beaucoup plus augmenté que dans le reste de la zone euro, les prélèvements obligatoires (impôts et cotisations) sont aussi beaucoup plus élevés. D'où la stratégie de ne plus produire en France que les véhicules les plus compliqués, comme les Laguna, Megane, Scenic. Des modèles qui malheureusement se vendent moins bien sur le territoire en ces temps de crise. « Produire en France, c’est une bonne chose et nous continuons de le faire sur des véhicules à forte valeur ajoutée, se défend Patrick Pelata, le directeur général du groupe. C’est plus difficile dans le bas de gamme mais ce n’est pas infaisable : la preuve, c’est que nous le faisons correctement, je crois, aujourd’hui. ».

L’Etat actionnaire minoritaire

Pour l’instant Renault semble avoir renoncé à priver totalement l’usine française de Flins de sa Clio. Le groupe souhaiterait néanmoins à l’avenir pouvoir fabriquer la future Clio IV à la fois en France et en Turquie. « Le transfert de la Clio IV en Turquie se fera en fonction de la montée en puissance de la Zoé (la voiture électrique) à l’usine de Flins », prévoit Patrick Pelata. Mais le gouvernement exige que toute la Clio IV soit construite en France, quel que soit le succès de la Zoé.

L'Etat a-t-il les moyens d'imposer au constructeur de maintenir à moyen et long terme la production de la Clio en France, où ce petit modèle se vend d’ailleurs très bien ? L’Etat est certes actionnaire de Renault mais il est très minoritaire aujourd’hui (15%), ce qui lui octroie uniquement 2 sièges sur 17 au conseil d'administration. Le gouvernement ne peut pas imposer sa volonté à l'entreprise. C'est donc au mieux une négociation qui devrait avoir lieu à l'Elysée, où Nicolas Sarkozy a convoqué le PDG Carlos Ghosn samedi après-midi, pour bien montrer qu'il a pris le dossier en main.
 

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