Aux agro-carburants traditionnels dont les effets sont souvent nocifs pour l'environnement, une alternative s'avère possible : la culture hors-sol d'organismes microscopiques.
Les biocarburants troisième génération sont en gestation. Leurs atouts : ils ne font concurrence ni aux cultures alimentaires ni aux espaces forestiers et peuvent être développés partout dans le monde. Deux grandes pistes de recherche sont ouvertes : l’une par la culture de cyanobactéries, l’autre par le développement de microalgues.
Stocks de lipides
Les microalgues font parti du phytoplancton. Elles produisent la moitié de l'oxygène terrestre et les pigments qu'elles synthétisent sont parfois responsables de la coloration rouge ou verte de l'eau. Mais dans le domaine des bioénergies, ces bactéries intéressent les chercheurs parce qu'elles stockent, pour leur propre croissance, des graisses (lipides) qui peuvent être récupérées pour produire du biogazole.
« Il s'agit encore de recherche fondamentale, précise le spécialiste Marc Rousset de l’Institut de microbiologie de la Méditerranée. Les biologistes étudient les flux métaboliques qui circulent au sein des cellules et essayent de mieux comprendre le processus de fabrication des lipides pour pouvoir ensuite l'orienter et l’optimiser selon les besoins. »
Depuis 10 ans, des avancées significatives ont été réalisées. Mais il reste un solide verrou à faire sauter : l'extraction des lipides. « En fait, dans nos laboratoires, on sait le faire. On récolte les cellules et on parvient à en extraire les lipides sans trop de souci technique mais avec un coût énergétique très élevé. Il faut donc réfléchir à des techniques d’extraction plus économes en énergie pour envisager une industrialisation. » Optimiste, Marc Rousset pense que d'ici 5 à 7 ans une filière industrielle exploitant ce procédé pour produire du biogazole pourrait voir le jour.
Secret de la photosynthèse
Autre voie : la culture de cyanobactéries pour fabriquer de l’hydrogène (H2). Ce gaz, qui brûle au contact de l’air, est une source énergétique propre. Sa combustion ne produit que de l'eau (H2O). Aux Etats-Unis, en Californie, des bus « pilotes » roulent à l’hydrogène.
Alors comment fait-on de l’hydrogène à partir d’organismes vivants microscopiques ? La solution réside dans la photosynthèse : « Comme les arbres, les cyanobactéries, pour se développer, utilisent la matière solaire pour fabriquer de la matière organique », explique Marc Rousset. Et quand ce phénomène naturel se déclenche sous l’effet de la lumière, apparaissent alors des molécules d’hydrogène.
Problème : les enzymes responsables de la production d'hydrogène, les hydrogénases, sont rapidement inhibées par l’oxygène produit par la photosynthèse. Toutefois, une solution se dessine. « On a trouvé une enzyme, l’hydrogènase, qui, dans son état naturel, produit de l’hydrogène capable de fonctionner avec de l’oxygène », explique le chercheur. Il s’agirait alors d s'inspirer cette enzyme pour modifier l'hydrogénase des cyanobactéries et ainsi fabriquer une cyanobactérie plus performante et donc exploitable pour en faire un carburant.
Restent encore de nombreuses difficultés à dépasser mais « la production d’hydrogène par photosynthèse est désormais envisageable », affirme Marc Rousset. Elle pourrait prendre une dimension industrielle d’ici 20 ans.