Taïwan: sous pressions des internautes chinois, un «vlogueur» résiste

Il se montre proche de la présidente taïwanaise et se fait aussitôt boycotter en Chine continentale. Ce « vlogueur », un blogueur qui fait des vidéos, a osé interviewer avec humour Tsai Ing-wen. Cela n’a visiblement pas plus du tout en Chine.

De notre correspondant à Pékin,

L’entrevue n’a pas fait rire du tout les réseaux sociaux, du moins à Pékin. Chen Chia-Chin, alias King Potter, est pourtant célèbre à Taïwan, mais aussi en Chine populaire où il a des centaines de milliers d’abonnés.

Mais depuis que le youtubeur a réalisé une vidéo, un entretien filmé conçu selon son auteur comme une « rencontre joyeuse » avec Tsai Ing-wen. L’actuelle présidente taïwanaise est candidate à sa réélection le 11 janvier prochain.

Le jeune vlogueur entendait, dit-il, inciter les jeunes à aller voter le jour du scrutin. La vidéo a fait déborder le vase des commentaires, suscitant une avalanche de critiques sur les réseaux de République populaire de Chine.

« Va-t’en, l’indépendantiste taïwanais ! »

On parle des internautes autorisés à s’exprimer, car vous le savez les réseaux chinois sont très surveillés. La censure coupe tout ce qui ne va pas dans le sens du discours officiel. Le discours officiel, c’est que Taïwan est une île rebelle qui doit revenir au plus vite à la mère-patrie.

La présidente Tsai Ing-wen, qui bénéficie d’une confortable avance dans les sondages, est d’ailleurs considérée par le régime comme une dangereuse indépendantiste. Et on retrouve cela dans les commentaires. En voici quelques-uns, et c’est assez radical : « Taïwan n’est pas un pays, va-t’en l’indépendantiste taïwanais ! »

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C'est aussi le titre employé dans la vidéo pour nommer la cheffe de l’État qui est contesté : « Où avez-vous entendu parler d’une présidente ? À Taïwan, il n’y a qu’un chef de l’exécutif. »

Ou plus violent encore : « Mes meilleurs vœux aux indépendants taïwanais, hongkongais, tibétains ou ouïghours. Je souhaite qu’ils quittent la Chine et s’installent dans un autre pays. Défendons nos îles ! » Une allusion évidemment à la révolte qui gronde depuis six mois à Hong Kong. La vidéo a été supprimée du web chinois le 11 décembre dernier.

La plateforme réagit d’abord

La plateforme de Chine continentale, Papitube, qui distribuait les vidéos de Chen Chia-Chin, a été la première à réagir. Papitube a d’abord demandé au jeune vlogueur de se mettre en conformité avec le principe d’une seule Chine défendue par le pouvoir chinois.

On lui a demandé notamment de retirer les termes de présidente, ou de Taïwan, comme une nation souveraine, ce que le jeune vlogueur a refusé trouvant absurde une telle demande. Il a aussi jugé déplacé le patriotisme des internautes continentaux par rapport à une vidéo qui se voulait encore une fois légère et destinée à motiver les plus jeunes à se déplacer aux urnes.

Résultat : fin du contrat pour le Roi Potter sur le continent. La vidéo a quand même fait, avant d’être censurée, plus de 3,3 millions de vues et a été écœurée plus de 200 000 fois, signe que tout le monde ne partage pas l’avis des critiques.

Et il ne s’agit pas d’un cas isolé. Il y a eu, la semaine dernière, une déferlante de posts patriotiques suite au tweet d’un joueur d’Arsenal critiquant la répression des minorités musulmanes dans l’ouest de la Chine.

La télévision d’État a aussitôt supprimé la retransmission d’une rencontre du club anglais. Pour ce qui concerne Taïwan, de nombreuses entreprises internationales ont subi ce genre de pressions leur demandant de changer le nom Taïwan sur leur site en Chine, notamment.

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