Avec notre envoyé spécial à Hong Kong, Christophe Paget
Le dixième week-end de manifestation successif dans la région administrative spéciale de Hong Kong s’est terminé sur de nouveaux heurts dans la soirée de dimanche entre des manifestants et la police. Samedi et dimanche, les marches prévues et interdites par les autorités se sont tenues pour la plupart, et dans le calme. Mais le soir venu, des petits groupes de manifestants qui bloquaient des routes ont affronté la police. Les manifestants hongkongais demandent toujours le retrait total du projet de loi d’extradition, qui permettrait que les personnes arrêtées à Hong Kong soient jugées en Chine. Le texte est pour l'instant suspendu.
Pour la première fois depuis le début de la contestation, la police a utilisé des gaz lacrymogènes dans une station de métro, dans le district de Kwai Chung, au nord. En fin d’après-midi, peu à peu, des petits groupes de manifestants avaient érigé des barricades en plusieurs points de Hong Kong, et le désormais traditionnel jeu du chat et de la souris avec la police a duré plusieurs heures. La police a tiré des gaz lacrymogènes, des balles en caoutchouc et a procédé à des arrestations. Plusieurs personnes se sont plaintes d’avoir été interpellées par des policiers déguisés en manifestants. Selon les autorités hospitalières, 13 personnes ont été blessées.
Depuis trois semaines, la police interdit les manifestations ou ne les autorise que si elles restent confinées à un seul endroit. Ce qui n’a pas empêché dimanche une marche dans le district de Sham Shui Po, et c’est là que les premières barricades ont été érigées. À Victoria Park, sur l’île de Hong Kong, les manifestants avaient quant à eux organisé un grand meeting : des députés pro-démocratie, des travailleurs sociaux, des enseignants se sont succédé devant des milliers de personnes pour témoigner et donner leur avis sur la suite du mouvement. Un « sit in » de trois jours était également organisé ce week-end à l’aéroport.
Comment la violence s'est-elle installée à Hong Kong
Tout a commencé en février lorsque la cheffe de l'exécutif, Carrie Lam, a décidé de modifier la loi sur les extraditions. L’opposition a alors dénoncé un renforcement du contrôle de Pékin, et les manifestations ont commencé fin avril. Le 9 juin, un million de personnes descendaient dans les rues, la plus grande manifestation depuis la rétrocession de 1997 par Londres. C'est à ce moment que les violences ont commencé entre police et protestataires : 79 militants blessés et un décès, un manifestant tombé d'un toit. La Chine avait condamné des « émeutes » et apporté son soutien au gouvernement hongkongais.
Le régime communiste menacera ensuite d’envoyer l’armée. Mais le 15 juin, Carrie Lam suspend le projet de loi, à la veille d'une manifestation réunissant quand même 2 millions de personnes. Dès lors, les blocages se multiplient. Le 1er juillet, le Parlement est envahi par les manifestants, qui saccagent les locaux. Ces derniers se mettent à demander un retrait total du projet de loi, et une enquête indépendante sur les violences policières. Le 21 juillet, les participants d’une manifestation sont violemment agressés par des membres présumés des triades, et la police est accusée d’avoir laissé faire. Le gouvernement durcit encore le ton.
Des dizaines de manifestants sont alors arrêtés et inculpés. Mais pas de quoi pour autant arrêter la mobilisation, qui change encore de forme le 5 août, avec l'organisation d'une grève générale perturbant fortement le territoire. La police interdit désormais les manifestations du week-end, qui ont quand même lieu pour la plupart. Et le soir venu, des petits groupes tentent donc, comme ce week-end, de bloquer les rues quitte à affronter la police. Ces jours-ci, beaucoup, dans les rangs de la contestation, proposent la tenue d'une nouvelle grève générale pour attirer l’attention du gouvernement et éviter les blessés et les arrestations.