Avec notre envoyé spécial à Hong Kong, Christophe Paget
Hong Kong est une ancienne colonie britannique, et le Victoria Park, du nom de l'ancienne reine du Royaume-Uni, est connu pour accueillir des manifestations à Causeway Bay. C'est également là que tous les 4 juin a lieu une veillée en mémoire des victimes de la répression de la place Tiananmen à Pékin.
La marche de ce dimanche était censée rejoindre Victoria Harbour, le bras d'eau qui sépare l’île des territoires plus au nord dans la région administrative spéciale. Mais comme toutes les manifestations, depuis le week-end dernier, elle a été interdite. Les manifestants étaient juste autorisés à rester dans le parc.
Évidemment, pas de quoi les arrêter, vêtus de leur traditionnel t-shirt noir. Les volontaires installés sous une tente rouge ont amené avec eux de l’eau - il faisait très chaud -, des masques, de quoi soigner les gens aussi. Ils collaient sur les piliers des posters où l'on pouvait lire : « Libérez Hong Kong ».
Pour une enseignante, c'est la « bataille de la dernière chance »
En moins de 48 heures, les organisateurs ont ainsi monté une grande rencontre avec des députés pro-démocratie, des travailleurs sociaux ou encore des enseignants, qui se sont succédés pour témoigner au micro sur une sorte de tabouret de chantier. Pas le temps de trouver une véritable estrade.
Des milliers de personnes rassemblées ont calmement écouté les discours, assises sur le gigantesque terrain de football du parc, sous des parapluies. Un travailleur social très ému a expliqué comment il avait été arrêté par la police lors d’une manifestation, et comment il risquait de perdre sa licence.
Une enseignante a appelé toute la population à manifester. Pas seulement les jeunes, car « si nous perdons, nous perdons pour toujours », confiait-elle à RFI, parlant d'une « bataille de la dernière chance ». Un ancien du « mouvement des parapluies » a appelé à une nouvelle grève générale.
L'extradition vers la Chine continentale fait toujours aussi peur
L'idée d'organiser une nouvelle grève générale, comme celle de lundi dernier, fait son chemin parmi les participants. Mais l'idée de cet ancien de la révolte de 2014 serait plutôt de viser particulièrement le secteur des transports publics, pour qu’enfin le gouvernement écoute les revendications des manifestants.
Des manifestants expliquent à RFI que le gouvernement fait des conférences de presse, communique, mais qu'il ne répond à aucune de leurs cinq demandes, dont la première concerne toujours l'extradition. Tant qu’il ne répond pas, ils vont continuer, promettent-ils.
Des participants en train de déployer une immense bannière se disaient ce matin, et c'est le message de la bannière, très contrariés et déçus. À leurs yeux, le projet de loi sur l’extradition - extradition surtout vers la Chine, c’est ce dont ils ont peur -, doit être retiré, et plus seulement suspendu.
Des Hongkongais pour partie prêts à marcher malgré l'interdit
Beaucoup ont parlé des violences policières. Un député a répété la question que les économistes lui posent le plus souvent : à quand, la fin du mouvement ? Sa réponse : « La question n’est pas de le terminer, c'est de savoir si nous allons parvenir à conserver les valeurs fondamentales de Hong Kong. »
Dans cette sorte de gigantesque assemblée générale, une fois de plus, ce sont des jeunes qui se sont rassemblés. Mais dès la sortie du métro le plus proche, deux personnes âgées distribuaient aussi des tracts. Un retraité confie à RFI qu'il retrouvait dans les discours ces mêmes valeurs qu’il partage.
Ce dernier aurait souhaité une marche, même interdite. Et de fait, il n'était pas le seul, puisqu'avant la fin du meeting, une centaine de manifestants sont partis remplir les rues adjacentes du quartier commerçant de Causeway Bay, aux cris de : « Il n’y a pas d'émeutiers, juste la tyrannie ! »
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