Accord Vatican-Chine: une étape, mais encore beaucoup de questions en suspens

Le Vatican et la Chine, qui n’ont pas de relations diplomatiques depuis 1951, ont accepté un compromis historique pour la nomination des évêques chinois. Mais cette première étape ne suffira pas à résoudre les tensions qui parcourent l'Église catholique chinoise et ses douze millions de fidèles.

Jusqu’ici, il y avait des évêques nommés par Pékin et des évêques nommés par le Vatican. La plupart étaient reconnus par les deux parties, mais certains non. Pékin faisait la chasse aux évêques du Vatican, et Rome a excommunié plusieurs évêques nommés par les autorités chinoises.

« Il y a deux Eglises en Chine, explique l'historien des religions Odon Vallet. Une Eglise officielle, reconnue par le gouvernement, dont les évêques ne sont pas tous reconnus par le Vatican. Et puis une Eglise de la clandestinité, qui a été très souvent persécutée, parce que ses évêques n’étaient pas acceptés par le gouvernement et parfois d’ailleurs, ils étaient nommés dans le plus grand secret par le Vatican. »

L'accord entre Pékin et le Vatican va donc résoudre un sujet de tension vieux de 70 ans, rappelle le chercheur Odon Vallet. « Le Vatican et la Chine sont brouillés depuis 1949. La Chine maoïste voulait absolument contrôler la nomination des évêques. Ce qu’il y a de nouveau, c’est qu’on a fait un compromis par lequel les évêques seraient nommés par accord entre le gouvernement chinois et le Saint-Siège. »

La popularité du pape

Pour les chrétiens de l’Église officielle chinoise, c’est la fin d’un pincement au cœur : ces fidèles respectent en général le gouvernement chinois, mais ne pouvaient pas officiellement évoquer l’autorité du Vatican et du pape.

Or le pape est très populaire. Il n’est pas rare de croiser des grandes affiches à son effigie dans les églises officielles. On les retire simplement le jour où des responsables locaux viennent visiter les lieux, explique notre correspondant à Shanghai, Simon Leplâtre.

Les craintes de l'Eglise clandestine

Cependant, indique notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde, le communiqué publié samedi ne donne pas de détails concernant le processus menant à ces nominations. Il ne dit rien non plus du sort réservé aux évêques « clandestins » dont certains pourrait devoir se retirer ou servir les évêques nommés par le gouvernement. « Nous, les catholiques, nous devons obéir et accepter les décisions de la curie pontificale. Nous ne comprenons pas parfois certaines décisions, nous ne comprenons pas pourquoi le Vatican agit ainsi »,  confie au téléphone un prêtre du Hebei qui souhaite garder l’anonymat.

L’accord entre Rome et Pékin enlève certes un sujet de conflit mais il est loin d’être le seul. Pékin a toujours combattu cette Église non déclarée, a emprisonné des évêques rebelles. Et en ce moment la pression est maximale. Des lieux de culte non déclarés sont détruits régulièrement. Il faudra donc bien plus pour réconcilier les catholiques de Chine.

Un accord « flexible »

L’église du Mont-Carmel à l’ouest de la capitale chinoise fait partie de l’Association patriotique catholique, autrement dit de l’église officielle. Une communauté plutôt favorable à l’accord passé entre le pouvoir chinois et le Vatican. « C’est une très bonne nouvelle, car cela veut dire que l’Eglise de Chine et du Vatican sont unies »,  affirme cette jeune trentenaire venue à la messe avec des amies. Comme elle de nombreux paroissiens sont jeunes et font partie de la classe moyenne pékinoise.

L’accord public reste « flexible » et pourra être « amélioré » avec le consentement des deux parties pendant une période d’expérimentation dont la durée n’a pas été précisée selon le communiqué publié. Le contenu du texte lui-même n’a pas été rendu public.

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