Afghanistan: l’enquête sur l’attaque de l'hôpital militaire de Kaboul avance

L'enquête suit son cours en Afghanistan, moins d'une semaine après l'attaque de l'hôpital militaire de Kaboul qui a duré six heures et qui a été revendiqué par l'organisation Etat islamique. Les autorités évoquaient l'existence de quatre assaillants. Un kamikaze et trois autres hommes armés de grenades et de kalachnikovs, déguisés en docteurs, ont ouvert le feu à l'intérieur de l'établissement, tué des personnes au couteau. Le bilan officiel fait état d'au moins 31 morts et de dizaines de blessés. Selon des sources médicales, le bilan serait beaucoup plus lourd avec une centaine de morts au moins.

De notre correspondante à Kaboul,

Alors que l'enquête avance, que les témoignages se multiplient, le mode opératoire des assaillants apparaît un peu plus clairement. Ces derniers jours, certains survivants parmi le personnel de l'hôpital présent le jour de l'attaque, témoignent : certains disent avoir reconnu parmi les assaillants des internes qui travaillaient dans l'hôpital depuis quelques mois. Cette information, les autorités ne la confirment pas pour l'instant. En revanche, elles se disent persuadées que les assaillants ont bénéficié de complicités internes. « Un terroriste ne peut pas entrer facilement dans l'hôpital. Ils ont certainement dû recevoir l'aide d'autres personnes », disait, dimanche 12 mars 2017, le porte-parole du ministre afghan de la Défense.

Ce que l'on apprend également à travers les témoignages des survivants, c’est que ces hommes armés semblaient très bien connaître les lieux. Des médecins sur place disent avoir vu les hommes armés entrer dans les salles, à chaque étage, abattre les patients et leurs médecins d'une balle dans la tête, de façon systématique, achevant au couteau ceux qui étaient immobilisés sur leur lit. Les assaillants ont ainsi abattu des dizaines de personnes, faisant de nombreux blessés, à chaque étage de cet hôpital qui en compte sept ; le dernier étage étant celui des personnalités politiques ou militaires, ou de leurs proches.

Un mode opératoire qui fait penser à une attaque des talibans

Selon une source sécuritaire, une telle opération nécessite des mois de préparation. Si l'organisation Etat islamique a revendiqué cet attentat, les responsables de l'Etat afghan sont assez sceptiques. C'est essentiellement la complexité de cette attaque, une attaque préparée depuis longtemps avec l'aide présumée de personnes internes, qui les fait s’interroger. Ce mode opératoire fait penser, selon eux, qu'il s'agit des talibans dont le réseau est étendu dans tout le pays.

L'organisation Etat islamique est présente en Afghanistan depuis seulement deux ans. Ses membres resteraient cantonnés, à l'heure actuelle, dans quatre districts, dans l'Est, près de la frontière avec le Pakistan, selon l'OTAN. L’Alliance indique que, si ses membres étaient environ 3 000 en 2015, ils ne seraient plus que 700 aujourd'hui. Bien sûr, il faut considérer ces chiffres avec précaution, d'autant plus que l'ONU, dans de récents rapports, affirme que l'organisation terroriste est de retour dans certaines zones d'où elle avait été chassée.

Les services de renseignement afghan pointés du doigt

Il est vrai que l'organisation Etat islamique a revendiqué l'attaque contre l'hôpital sur les réseaux sociaux. Mais il faut rappeler que, dans un premier temps, quelques heures après le début de l'assaut du groupe commando, les talibans avaient une position assez étrange : ils disaient ne pas pouvoir confirmer ni infirmer leur responsabilité dans l'attentat. Plus tard, dans la journée du mercredi 8 mars 2017, ils ont fini par nier toute implication, ce qui n'étonne pas certains analystes car il n'est pas rare que les talibans nient leur responsabilité dans des attaques qui font de nombreuses victimes parmi les civils.

Cet attentat a un impact particulier sur l'opinion publique parce que cet hôpital est assez emblématique – il est un peu l'équivalent du Val-de-Grâce à Paris. On y soigne toutes les personnalités publiques et notamment les militaires, dont les haut-gradés de l'armée. Et cet hôpital a la réputation d'être particulièrement bien gardé. Il faut passer plusieurs postes de contrôle avant de pouvoir y entrer. Cette attaque montre les failles du système sécuritaire et l'incapacité du gouvernement à assurer la sécurité de la population. Les services de renseignement sont particulièrement pointés du doigt.

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