De notre correspondant à Séoul,
Les auteurs coréens ont commencé à publier leurs BDs en ligne il y a dix ans, alors que les éditeurs papier disparaissaient les uns après les autres. Ces webtoons – contraction de web et cartoon – sont devenus une industrie florissante, avec des dizaines de sites, des milliers d’auteurs. Si l’on inclut les produits dérivés, c’est un marché évalué à 320 millions d’euros, qui devrait doubler d’ici deux ans. Un Coréen sur trois en lit au moins une fois par semaine.
La plupart de ces BD sont gratuites. Elles se lisent le plus souvent sur un smartphone, en faisant défiler la page vers le bas. Certains auteurs rajoutent des animations, de la musique, des effets sonores, voire même des vibrations. Les genres sont variés, de la romance à la science-fiction, d’autres abordent des thèmes sociaux très sérieux.
Des BD sur internet
Leur succès est facilité par un internet ultra-rapide et par l’appétit insatiable des Sud-Coréens pour tous les gadgets connectés. Et les sites coréens veulent maintenant exporter ce modèle de publication de BD. Les webtoons sont partis à l’assaut du monde, et on assiste à une véritable frénésie de traductions dans plusieurs langues, et à l’ouverture de nouveaux sites dans de nombreux pays.
L’éditeur Line, par exemple, a ouvert des plateformes mobiles en Chine, en Indonésie, à Taïwan, au Japon et aux Etats-Unis. Pour le marché américain, Line a traduit 50 séries, sur un catalogue qui en comprend 500. Parmi celles-ci, on trouve même une adaptation « webtoon » de la célèbre saga Star Wars.
Son principal concurrent, le géant Kakao, est en train de l’imiter sur les marchés chinois et américains. Ces deux sites majeurs sont gratuits : ils se financent grâce à la pub, aux produits dérivés, aux adaptations télé, et aux ventes papier. Quant à l’éditeur indépendant Lezhin, il propose lui ses webtoons payants aux Etats-Unis et au Japon.
Les webtoons face à un problème endémique, le piratage
Autrefois, les BD les plus populaires étaient traduites par des amateurs étrangers, des traductions pirates tolérées par les sites : cela leur permettait de tester l’appétit des lecteurs étrangers pour leurs séries.
Mais maintenant qu’ils entrent légalement sur ces nouveaux marchés, les éditeurs coréens sont entrés en guerre contre des sites pirates très difficiles à faire fermer. Le quotidien Hankyoreh révèle par exemple que la quasi-totalité des séries publiées par la plateforme spottoon.com sont copiées illégalement par d’autres sites. Pour le journal, ce problème est même « une bombe à retardement » qui menace cette nouvelle vague culturelle coréenne…
Pour aller plus loin :
■« Hive », un webtoon sur la Corée envahie par des insectes géants
■ D'autres sites de webtoons en anglais Spottoon, et Tapastic