Les portes de la douane s'ouvrent sur un jeune homme au sourire rayonnant. Pour la première fois de sa vie, Ziaullah Quraishi foule le sol français. L'émotion est forte. Pendant la guerre menée par la France en Afghanistan, il a servi quatre ans l'armée française en tant qu'interprète.
700 civils employés par l'armée française
Dans son pays natal, il était menacé de mort par les talibans et a, finalement, pu bénéficier du nouveau processus d'accueil que Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, s'était engagé à ouvrir en avril 2015.
Entre 2002 et 2014, les forces armées françaises ont employé 700 civils afghans, comme interprètes ou chauffeurs, notamment. En 2014, seulement 76 avaient obtenu un visa pour la France, qui a accueilli 179 personnes, en incluant les familles de ces ex-employés. En mars dernier, une trentaine d’anciens interprètes ont manifesté non loin de l’ambassade française à Kaboul. Et dans la foulée, un collectif d’avocats défendant les intérêts de 54 d'entre eux a mené la charge sur le plan judiciaire. En avril, le ministère français des Affaires étrangères a finalement annoncé que les dossiers allaient être réexaminés.
Des visas au compte-gouttes
Ziaullah Quraishi, premier de ces anciens interprètes afghans à se poser à Paris depuis deux ans, entend bien se faire le porte-parole de tous ceux qui sont encore en Afghanistan. « Je suis content, mais je suis un peu inquiet aussi. Parce qu’ici, je suis seul. (…) Mes amis, ils sont en Afghanistan, ils vivent sous la menace », explique-t-il à se descente d’avion. « Mes collègues interprètes, ils m’ont dit : "Tu vas là-bas, il faut raconter, il faut expliquer notre problème". La France, il faut qu’elle nous aide », plaide-t-il en étouffant un sanglot. « C’est quoi notre faute ? Rétablir la paix ? C’est ça notre faute ? »
Mais en Afghanistan, l'ambassade de France délivre les visas au compte-gouttes et ne prévoit pas de véritable suivi. Ziaullah Quraishi est d’ailleurs surpris de ne pas être plus entouré. « Dès que je suis arrivé, je me suis perdu », glisse-t-il. Il ne sait que faire. « Je trouve où [quelqu’un] qui peut m’aider ? ». Avant de prendre l’avion, il a joint l’ambassade de France pour obtenir des renseignements. « J’ai téléphoné dix fois. La première fois, c’était la secrétaire de l’ambassadeur. Elle m’a juste dit : "Je te donne le visa, maintenant, c’est toi qui décides". »
Ce mardi, deux militaires attendaient Ziaullah Quraishi à la descente de l’avion. Ils l'ont conduit à Rennes, en Bretagne, pour y être hébergé.