La vie semble s’être ralentie à Séoul depuis le début de l'épidémie de coronavirus MERS. Beaucoup de Coréens évitent les lieux publics, on voit beaucoup moins de personnes dans les restaurants. Dans les pharmacies, les stocks de désinfectants pour les mains et de masques pour le visage sont épuisés. Des masques qu’un nombre croissant de Coréens portent dans la rue ou dans le métro. A ce jour, 1 800 écoles ont temporairement fermé leurs portes, y compris la maternelle et l’école primaire du lycée français de Séoul, qui est situé à Gangnam, dans la partie de la capitale où se trouve le centre médical Samsung, un hôpital où se trouvent 17 malades et où 890 personnes ont été exposées au coronavirus.
Géolocalisation des malades en quarantaine
Face à l’inquiétude qui monte, le gouvernement a annoncé dimanche 7 juin qu'il allait surveiller les smartphones des personnes mises en quarantaine, pour les localiser et vérifier qu’elles ne sortaient pas de chez elles ! Des dizaines de milliers de touristes des pays voisins ont déjà annulé leur voyage. Les exemples de la paranoïa ambiante sont nombreux : on voit à la télévision des journalistes qui font des directs avec un masque sur le visage ; sur les réseaux sociaux des photos de lieux publics, stades, plages, zoos, complètement déserts.
Un taux de mortalité qui inquiète les Coréens
Les Coréens sont inquiets parce qu’on ne connait pas le mode de transmission exact du coronavirus, et qu’il n’existe aucun traitement connu. Le MERS est un virus respiratoire cousin du SRAS, qui avait fait 800 morts dans le monde il y a dix ans. Son taux de mortalité est de 40% environ. En Corée, il semble se propager plus vite qu’ailleurs. Mais le ministère de la Santé coréen se veut rassurant. Il affirme que le séquençage ADN du virus a montré que celui-ci n’a pas subi de mutation en arrivant en Corée. Une mutation aurait pu signifier une plus grande dangerosité. Les experts, comme ceux de l’Institut Pasteur à Séoul, estiment qu’il faut garder son calme. Mais cela ne suffit pas à apaiser les Coréens, qui accusent les autorités d’opacité et de lenteur : le ministère a par exemple refusé jusqu’à dimanche 7 juin de divulguer la liste des hôpitaux qui ont accueilli des malades. Les hôpitaux n’avaient pas de procédures adéquates pour empêcher la propagation du virus, et les premières mises en quarantaine n’ont pas été correctement imposées.
Une crise sanitaire et une crise de confiance
Depuis le naufrage du ferry Sewol l’année dernière, une tragédie qui a fait plus de 300 victimes, la méfiance déjà traditionnellement forte des Sud-Coréens vis-à-vis de leur gouvernement s’est exacerbée. Le Sewol a coulé avec des centaines d’enfants à bord, en direct à la télévision, sans que les autorités ne puissent les sauver ; et ce naufrage est un traumatisme dont les répercussions se font toujours sentir. Même la presse conservatrice et pro-gouvernementale se lâche. « Nous réalisons que notre gouvernement est moins fiable, et plus incompétent, que jamais », écrit par exemple le Joongang Ilbo. La présidente Park Geun-hye a perdu six points de popularité en une semaine. En dehors des risques réels mais limités d’une épidémie à grande échelle, c’est surtout ce manque de confiance qui explique la panique à laquelle on assiste en ce moment en Corée du Sud.